
$37.19 de plus par tête
Par Charles Hamel (Lettre de Québec, mercredi, 23 janvier 1952)
Québec. Au début de la semaine dernière, le premier ministre de la province, M. Maurice Duplessis, a reçu en trois jours près de cinq mille télégrammes qui, rédigés pour la plupart de façon identique, réclamaient tous l’intervention du gouvernement provincial en vue de remédier à la hausse du coût de la vie et d’enrayer le chômage qui se répand dans le Québec.
Les renseignements recueillis permettent de croire que la majorité des télégrammes en question venaient d’adeptes du mouvement de Crédit social, et l’on peut supposer que ceux-ci, en télégraphiant comme ils l’ont fait, obéissaient à un mot d’ordre de leur parti.
Cependant, il est permis de croire aussi que d’autres citoyens de la province de Québec que les créditistes ont envoyé au premier ministre des télégrammes demandant que des mesures soient prises contre la vie chère et le chômage; il est certain que les membres du Crédit social ne sont pas les seuls à souffrir de ces maux.
Mais, de qui que viennent télégrammes et protestations, le gouvernement de l’Union nationale ne manifeste aucune intention de faire quoi que que ce soit, pour remédier à la situation. Le chômage, le gouvernement provincial se contente de le nier ; quant à la vie chère, il prétend que c’est uniquement l’affaire d’Ottawa.
Cependant, lorsque l’on tient compte du facteur que représente l’augmentation des taxes et impôts dans l’accroissement du coût de la vie, on constate que le régime duplessiste a largement contribué pour sa part, à la hausse du coût de la vie dans le Québec, faisant de notre province la plus taxée de la Confédération, en même temps que celle où en coûte aujourd’hui le plus cher pour vivre.
Dans le remarquable discours qu’il prononçait la semaine dernière à l’Assemblée législative, intervenant dans le débat sur le budget, M. Paul Earl, député libéral de Notre-Dame-de-Grâce, a montré comme le montant des taxes et impôts perçus dans le Québec a constamment augmenté sous l’Union nationale. Sous le dernier gouvernement libéral, le revenu des taxes provinciales s’élevait à $65 millions. Il atteint aujourd’hui le total énorme de $223 millions.
En d’autres mots, les taxes, qui étaient en moyenne de $18,57 par personnel dans le Québec en 1944-45, ont monté depuis à $55.76 pour 1951-1952. Cela signifie une augmentation de $37.19 par tête, en sept ans d’administration de l’Union nationale.
Cpmme le signalit encore M. Earl, les réductions d’impôts consenties par le présent gouvernement se sont limitées à deux mesures, l’une qui ne soulage que les municipalités rurales, et d’autre qui réduit d’un montant négligeable l’impôt sur les successions.
Quand un gouvernement qui accuse des revenus au total de 270 millions n’accorde de réductions de taxes que pour $1,300,000, il a fait bien peu en vérité. Ainsi que le disait le député de Notre-Dame-de-Grâce, la montagne a enfanté une souris.
Le ministre des Finances de la province, M. Onésime Gagnon, peut déclarer fièrement, en annonçant son budget pour 1952-53, qu’il n’impose pas de taxe nouvelle… Le contraire eût été étonnant, lorsqu’il s’agit d’un budget pré-électoral. Il reste quand même que ce fameux budget nous laisse dans la position peu enviable des contribuables les plus taxés de la Confédération.
Et toutes ces taxes que nous payons augmentent terriblement, pour nous du Québec, le coût de la vie. Pas étonnant que M. Duplessis soit débordé de protestations !
Les gens de l’Union nationale diront peut-être, pour se défendre, que les impôts fédéraux sont aussi très élevés. Ils le sont, c’est un fait. Mais le gouvernement du Canada a la mission de préparer la défense de la patrie, et de créer la force qui, seule, peut peut-être encore sauver la paix menacée.
Quand le gouvernement national a de telles obligations auxquelles il ne saurait se dérober, et qui pèsent lourdement sur tous les citoyens du pays, le devoir est plus grand encore pour les diverses administrations provinciales d’éviter les dépenses qui ne sont pas indispensables.
C’est ce que le régime de l’Union nationale n’a pas compris, ou fait semblant de ne pas comprendre.

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