La Société secrète des Frères Chasseurs
Les Frères Chasseurs, cette mystérieuse organisation secrète, voit le jour pendant la rébellion de 1837–1838.
Son but est d’unir les combattants pour l’indépendance du Canada. Elle est créée par des Patriotes exilés aux Etats-Unis. Les Frères Chasseurs envisagent de renverser le gouvernement et d’instaurer une république au Bas-Canada.
Parmi les fondateurs, on trouve plusieurs membres éminents de la société, tels que MM. Robert Nelson, Cyrille-Hector-Octave Côté, Julien Gagnon, François-Marie-Thomas Chevalier de Lorimier, Antoine Doré, John de Belestre McDonnel, Édouard-Élisée Mailhot et quelques autres.
Les Frères Chasseurs constituent des loges, ils commencent à se former militairement et ils sont liés par des rites d’initiation et un serment solennel. Mais leur existence sera éphémère.
L’organisation comprend plusieurs degrés: le Grand Aigle (chef du territoire), l’Aigle (chef de corps), le Castor (ayant l’autorité d’un capitaine), la Raquette (correspondant à un chef de section) et le Chasseur (soldat). Pour chaque degré, des signes particuliers sont établis.
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Le chef suprême des Frères Chasseurs, le Grand Commandeur, est Robert Nelson, nommé également président de la république du Bas-Canada. Le Grand Aigle du Nord est Édouard-Élisée Mailhot, étudiant en droit, et Charles G. Bryant, habitant de Bangor (dans l’État du Maine) tient le rôle du Grand Aigle du Sud. Des Aigles secondent des Grands Aigles. En fait, les Aigles commandent chacun une «brigade» ou une «division» de cent hommes.
Ces brigades se divisent en deux sous-divisions de cinquante hommes. Ces brigades se placent donc sous le commandement des Castors. Le Castor a cinq Raquettes, chaque Raquette a sous ses ordres neuf Chasseurs.
L’unité de base des Frères Chasseurs est la loge, qui est composée de plusieurs membres assermentés. Le serment d’initiation oblige le membre à «respecter les secrets, signes et mystères de la société dite des Chasseurs; ne jamais écrire, peindre ou faire connaître d’une manière quelconque les révélations qui m’auraient été faites par une loge de Chasseurs; être obéissant aux règles et règlements que la société pourra faire… Tout cela je le promets sans restriction et consens à voir mes propriétés détruites et à avoir moi-même le cou coupé jusqu’à l’os…».
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L’Association des Frères Chasseurs accueille ses nouveaux membres lors d’une cérémonie secrète. On bande les yeux du néophyte avant de le faire entrer dans une pièce où se trouvent des initiés. Le candidat doit alors s’agenouiller et répéter mot pour mot la formule du serment. Puis, on lui demande ce qu’il veut voir et il doit répondre: «La lumière». On lui retire alors son bandeau et il se retrouve face à deux Chasseurs dont l’un tient un pistolet et l’autre une dague pointée vers sa tête. Une torche ardente se trouve derrière eux. Cette mise en scène symbolise le sort qui attend le chasseur si il trahit la société.
Les initiés disposent aussi de divers signes afin de pouvoir se reconnaître entre membres.
En septembre 1838, les Frères Chasseurs comptent 35 loges réparties dans plusieurs villes du Bas-Canada. On trouve ainsi des loges à Châteauguay, Trois-Rivières, Berthier, Québec, Sainte-Martine, Longueuil ou Boucherville.
C’est à Saint-Albans (dans l’État américain du Vermont) que s’installe le comité général des Frères Chasseurs. Il supervise l’action de toutes les loges de Chasseurs, autant dans le Bas que dans le Haut-Canada, ou dans le nord des États-Unis où l’on appelle l’organisation Hunter’s Lodge. Selon certaines versions, l’Association des Frères Chasseurs a aussi des ramifications en France.
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Évidemment, on ne connaît pas le nombre exact de personnes impliquées dans cette organisation secrète. Le chiffre de 200 000 membres semble pour le moins exagéré. Pourtant, selon certaines sources plus crédibles, 40 000 personnes prêtèrent le serment de chasseur.
On sait qu’un nombre significatif de colons anglais des Cantons de l’Est se sont joints à la société, ainsi que des Américains et des habitants de l’Ontario.
Le plan général d’invasion, combiné par W. L. Mackenzie et d’autres chefs du Haut-Canada, fut fixé au 3 novembre 1838.
Mais le plan échoua après la bataille d’Odelltown, le 10 novembre. Les autorités exécutèrent plusieurs prisonniers à la prison du Pied-du-Courant. Par contre, Nelson et des centaines d’autres se réfugièrent aux États-Unis.
L’insurrection de 1838 est la dernière action des loges des Frères Chasseurs.
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