Saboteurs à l’œuvre au Canada

Saboteurs locaux inspirés et guidés par les Russes menacés de prison

Ottawa. 21 février 1947 – Le Canada aura-t-il avant longtemps une longue série de procès de sabotage comme, il y a quelques années, les célèbres procès d’espionnage russe? Voilà ce que l’on se demande dans les cercles parlementaires de la capitale fédérale. En effet, la mise hors de service, du jour au lendemain, de la fameuse pile à l’eau lourde de l’usine atomique de Chalk-River commence à faire parler en haut lieu.

Et il semble certain qu’au cours de la session, un ou plusieurs des chefs des partis de l’opposition, à la Chambre des communes, se hâteront de poser au gouvernement des questions directes à ce sujet.

Mais, d’après les renseignements du correspondant du Petit Journal, M. Stuart Garson, ministre de la justice, causerait une sensation aussi grande que lors des révélations désormais historiques d’Igor Gouzenko, en annonçant l’arrestation et la mise en accusation d’un certain nombre de saboteurs, de toutes nationalités, à l’œuvre au pays depuis la fin de la guerre de 1939-45.

Si les choses en viennent là, le public apprendrait avec étonnement que Chalk-River n’a pas été au pays le seul endroit victime de sabotage. À l’immobilisation de l’usine atomique, il faudrait ajouter, en effet, toute une suite d’accidents et de catastrophes, dont plusieurs sont restées inexplicables jusqu’ici. On pourrait inclure dans cette liste es collisions maritimes de l’été et de l’automne derniers dans le fleuve Saint-Laurent, aux abords de Québec. Sans citer d’autres incidents multiples, survenus dans d’autres provinces, la chute du pont de Trois-Rivières aurait bel et bien été, comme l’a déclaré tant de fois le premier ministre, l’honorable, Maurice Duplessis, du sabotage en règle, il se peut néanmoins qu’il faille attendre la refonte définitive du code criminel avant d’envoyer les saboteurs au pénitencier. En effet, les nouveaux articles prévoyant une condamnation à dix ans de prison pour tout acte de sabotage n’ont pas encore reçu la sanction aux Communes, même si l’approbation requise a été donnée au Sénat avant le congé parlementaire de Noël et du jour de l’An.

Il est possible, par ailleurs que la Gendarmerie royale n’ait pas encore en main la totalité des preuves nécessaires à la mise derrière les barreaux des agents saboteurs à la solde de Moscou. En conséquence, tel que lors de l’enquête sur les affaires d’espionnage, il s’écoulera peut-être quelque temps avant que les autorités canadiennes réunissent les témoins et les documents indispensables pour traduire en justice les saboteurs secrètement à l’œuvre ici.

Quoi qu’il en soit, le correspondant du Petit Journal a appris, de source officieuse, que le Canada prend, à l’usine atomique de Chalk-River, mille et une précautions contre le sabotage. Ainsi, ce sont des savants — désignés officiellement sous le nom d’officiers de sécurité — qui surveillent les autres savants assignés au fonctionnement de la pile à eau lourde et de tout J’outillage nucléaire, afin d’empêcher qu’il ne se glisse parmi eux des agents secrets de la Russie.

D’autre part, le nouveau code criminel sévira impitoyablement, non seulement contre les espions et les saboteurs, mais surtout contre les traîtres. Ces derniers seront passibles de la peine de mort. Il est encore trop tôt pour prévoir si’ à l’exemple des États-Unis, le Canada exécutera les traîtres.

Séries de grèves de sabotage organisées par les rouges?

Londres. North American Newspaper Alliance. – Les espions militaires de l’Angleterre viennent de découvrir un complot très bien organisé par les rouges et dirigé de Vienne pour saboter le système de défense britannique comme aussi la campagne d’exportation de moteurs mis au point par le « Board of Trade ».

On va faire enquête pour savoir s’il y a des communistes derrière les récents arrêts de production à Burnley, Coventry, Birmingham, Cricklewood et Dagenham. Ces querelles patronales ouvrières auraient été mises au point, croit-on, au cours de la conférence de Vienne de l’Union européenne des métallos. Il est vrai que l’esprit, trop souvent obtus, du patronat anglais ne ramène pas les choses…

Quoi qu’il en soit, on sait qu’à cette conférence les délégués ont décidé la création de comités d’usine ayant pour tâche d’organiser « un combat solide et sans fissures, contre les programmes de défense et contre le plan Schuman de répartition des matières premières”. L’an passé, il y a eu 12 importants arrêts de travail dans les usines de moteurs et $5,500,000 en salaires seulement ont été perdus par les ouvriers.

Voir aussi :

Souvenir de la guerre
Souvenir de la guerre. Photographie de GrandQuebec.com.

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