La réglementation du Québec sur les produits marins forcera les fabricants à se moderniser
Faute de pouvoir regrouper les fabricants de produits marins du Québec, le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, M. Jean Garon, mise sur les effets de la nouvelle réglementation sur la qualité des produits marins pour accélérer la modernisation et la «québécisation» du secteur des pêches.
«Avec la réglementation sur la qualité des produits marins, qui doit être rendue publique ans les prochaines semaines, ça va swinguer vite et ceux qui ne vont pas swinguer vite vont être K-.O. », a déclaré M. Garon en conférence de presse, à l’issue de la Conférence sur la commercialisation des produits de la pèche au Québec qui s’est tenue jeudi et hier a Montréal.
«Très rapidement, des entreprises vont offrir un produit de très haute qualité et le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec (MAPAQ) va faire la promotion de ces produits», a précisé M. Garon.
Comme la rumeur courait hier que le gouvernement fédéral pourrait limiter les permis à l’exportation, alors que l’exportation est le marché – cible de la plupart des transformateurs québécois, M. Garon a estime que les producteurs qui refusent de se moderniser pourraient aboutir à un cul-de-sac. «Les producteurs ont maintenant de grosses décisions à prendre. Si les marchés à l’exportation sont réduits et si le marché québécois est réservé aux produits de qualité, il y aura un cul-de-sac quelque part», a dit le ministre des Pêcheries.
«Le gouvernement fédérale pourra cependant pas avoir des normes spéciales pour le Québec. Il aura les mêmes normes pour tout l’Est du Canada. Or. sur plusieurs points, le Québec est en avance sur les Maritimes. Par exemple, 80% de notre poisson est éviscéré avant le débarquement. Et les permis québécois sont quasiment tous attribués à la pêche à la palangre et non plus à la pêche au filet, ce qui donne un meilleur poisson,» a-t-il dit.
Même si la conférence sur la commercialisation a presque abouti à un «consensus» sur la nécessité d’organiser une table de concertation préparatoire à la création d’un Office de commercialisation des produits marins, M. Garon a estimé que «le niveau de consensus n’a pas encore été atteint» pour que la mise sur pied d’un tel Office n’apparaisse pas comme étant imposée de force, ce qu’il refuse de faire.
M. Garon a plutôt choisi de rencontrer dans les prochaines semaines les différents intervenants du secteur de, la distribution (chaînes, grossistes, etc.) pour étudier comment assurer, dans les épiceries et les poissonneries, un approvisionnement maximum de produits québécois. Les représentants des distributeurs se sont dits prêts à collaborer pour augmenter la consommation des produits du Québec.
Les transformateurs seront alors soumis à plus de pressions pour fournir en permanence des produits québécois au Québec.
«En tant que ministre de l’Alimentation, j’ai l’intention qu’il soit impossible de vendre au Québec des produits de qualité insuffisante», a aussi annoncé M. Garon. Il a indiqué en conférence de presse que les inspections seront plus sévères: «il n’y aura plus de «zone grise» dans l’inspection du poisson.
Il y aura des inspections régulières avec, s’il le faut, des analyses bactériologiques. Les stocks ne pourront pas être vendus avant que soient connus les résultats des tests», a précisé M. Garon. Il y aura probablement un sceau «Approuvé Québec» qui assurera le consommateur d’une qualité constante. On sait que le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation met de plus en plus en doute la fiabilité du sceau «Approuvé Canada».
Des consensus ont été obtenus sur la nécessité d’améliorer la formation des poissonniers, qui doivent collaborer à mieux informer les consommateurs et à augmenter la consommation de produits marins au Québec. Le MAPAQ va travailler avec l’Institut des viandes pour mettre au point un programme de formation des poissonniers.
La normalisation des noms des produits marins va être accélérée. Ainsi lorsque les stocks actuels seront écoulés, les consommateurs québécois achèteront de la plie et non plus de la «sole», vendue faussement pour de la sole L’Office de la langue française va en effet être prié de faire respecter son avis de normalisation des noms de produits marins, rendu public l’an dernier. Le soi-disant «turbot» va être appelé flétan du Groenland tandis que les «sardines» pêchées dans les Maritimes seront appelées par leur nom : harengs juvéniles.
M. Garon veut mettre de l’ordre dans les noms employés pour que les consommateurs sachent réellement ce qu’ils mangent «Il y a quelques années, on refilait du turbot pour de la sole parce que les gens ne connaissaient que la sole», a reconnu un transformateur. L’application de cette décision peut poser des problèmes, non seulement pour. les produits importés mais pour les pêcheurs qui semble-t-il se voient offrir 10 cents la livre ou 50 cents la livre selon que l’on baptise leur poisson d’un nom noble ou pas…
Par ailleurs, la recherche sera intensifiée pour utiliser les espèces de poissons rejetées (morts) à la mer par les pêcheurs car ils ne peuvent être commercialisés. Une enquête va être menée sur ces espèces rejetées et sur la possibilité de les commercialiser. Le MAPAQ s’est dit prêt à aider davantage le regroupement de pêcheurs, par catégories de pêche ou par espèces pêchées afin de faciliter cette commercialisation.
Enfin, la Société québécoise d’initiatives agro-alimentaires aura un rôle primordial pour aider les entreprises à se moderniser, mais elle s’intéressera surtout aux entreprises bien gérées.
(C’est arrivé au Québec en mars 1982).
Voir aussi :
- Québec vers la transition d’une économie de service
- Pêche dans le Saguenay
- Études sur la pêche au Québec
- Poissons des mers froids
