Projets d’union des Canadas

Projets d’union du Bas-Canada et du Haut-Canada, dans la première moitié du XIXe siècle

Ces heures d’angoisse passées, la ville reprit ses activités et ses luttes politiques, commencées en mai 1832 et qui devaient aboutir à la rébellion de 1837.

La province du Haut-Canada, établie en 1791 au bénéfice des loyalistes américains, était privée de communications directes avec l’Europe; et tout son commerce d’importation devait passer par Québec et Montréal.

La province, grâce à l’immigration, s’étant très vite développée, on ressentit bientôt les inconvénients de cette dépendance économique envers la province française, et l’union du Bas et du Haut-Canada parut à plusieurs le moyen de corriger cette situation.

À Montréal, les journaux anglais tenaient pour certaine l’union des deux Canadas, quand les Canadiens organisèrent soudain une formidable campagne de résistance au projet, dont la métropole londonienne était déjà saisie avant qu’ils en fussent avertis. Il y eut partout dans le district des assemblées publiques, dans lesquelles, Louis-Joseph Papineau, Pierre Guy, Denis-Benjamin Viger, John Neilson et d’autres exposèrent au peuple les multiples raisons de s’opposer à l’union des provinces canadiennes. Des milliers de signatures – les uns disent 80,000 – s’apposèrent à la suite d’une pétition commune, que MM. Papineau et Neilson furent chargés de présenter au gouvernement anglais. Il faut dire que les deux chambres du parlement de Québec firent également échec au projet, qui paraissait pour le moins prématuré. Il ne devait être réalisé que vingt ans plus tard, à la suite de la rébellion.

Entre temps, l’idée d’annexion continua de hanter nos voisins. Et, en 1832, un nouveau projet, d’envergure plus modeste, fut lancé dans le public. On demandait cette fois de rattacher l’Ile de Montréal et le comté de Vaudreuil à la province occidentale, par le corridor Vaudreuil-Soulanges.

Dans une réunion des chefs politiques et financiers, tenue à Toronto le 17 octobre, et présidée par les procureur et solliciteur généraux, on arrêta les termes du projet d’annexion. Pour motiver cet empiètement sur le territoire bas-canadien, on invoquait la nécessité pour le Haut-Canada de posséder un port maritime et de bénéficier pleinement des droits d’entrée de ses importations.

L’on comprend que le port de Montréal, situé à quelques milles seulement de la frontière ouest, devait être ardemment convoité par ces francs loyalistes de la couronne, qu’un accident géographique rendait tributaires de la province française.

À Montréal, le projet semble avoir été bien accueilli dans certains milieux d’affaires. Un certain Nathaniel Gould écrivait au bureau des colonies le 22 novembre, que « des gens de la plus haute respectabilité » – présumablement de Montréal, ajoute un historien – avaient tenu des assemblées au cours desquelles il avait été résolu de demander au gouvernement de sa majesté d’annexer le port de Montréal comme port d’entrée du Haut-Canada. (Douglas Brymner: Rapport sur les Archives Canadiennes pour 1900, p. XXVIII.)

Le parlement de Québec, s’appuyant sur la capitulation de Montréal (1760), s’opposa à tout projet de réduction du territoire bas-canadien, fut-ce pour l’avantage du Haut-Canada. Le parlement de cette dernière province discuta également la question et passa des résolutions contre l’annexion, sans cependant rien arrêter de définitif.

Le gouvernement impérial ne jugea pas opportun d’accomplir un changement aussi radical dans l’économie territoriale de sa colonie, dont les conséquences dans l’avenir ne pouvaient être prévues. Et l’on sait que le fleuve St-Laurent et tout ce qui s’y rattache comme stratégie militaire a toujours été et reste encore l’objet des sollicitudes du bureau de la guerre londonien. Aussi, lorsque le gouverneur Aylmer écrivait à lord Stanley qu’il verrait avec plaisir l’annexion de l’Ile de Montréal au Haut-Canada et que cette mesure deviendrait même nécessaire si le parlement continuait son opposition au gouvernement de Québec (Archives Canadiennes, Série Q, 216-2, p. 365. – Lettre d’Aylmer à Stanley, 8 mai 1834. le ministre anglais savait que le bavardage de la chambre contenait moins de risques pour l’avenir que l’annexion du port de Montréal à l’autre province, si voisine des États-Unis).

Colonne Nelson au cœur du Vieux-Montréal, en face de l’Hôtel-de-Ville. Photo de GrandQuebec.com.

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