Plus d’argent dans les urgences

Bouchard promet plus d’argent dans les urgences

(Épisodes de l’histoire du Québec : c’est arrivé le 9 février 1999)

« Impatient » d’en finir avec l’engorgement des urgences, Lucien Bouchard promet de débloquer des fonds supplémentaires si les 15 millions annoncés il y a dix jours ne suffisent pas.

« Si ce n’est pas suffisant, il y en aura d’autres, a affirme le premier ministre dans une entrevue à TVA. Je suis tout à fait déterminé à ce qu’on prenne les moyens, quels qu’ils soient, où qu’il faille agir, pour régler les problèmes de surplus dans les urgences. »

M. Bouchard laisse entendre qu’une partie de la solution pourrait se trouver dans la négociation en cours avec la Fédération des omnipraticiens, négociation où Québec a exigé de discuter en priorité du cas des urgentologues qui se plaignent de leur rémunération.

Les médecins choisissent de faire moins d’heures dans les urgences, pendant que les cas s’y alourdissent, remarque en outre le premier ministre. « Il semble que certains médecins aiment mieux compléter leur plafond de rémunération en clinique privée qu’en hôpital et dans les urgences, dit-il. On va agir sur ces facteurs. » La ministre de la Santé, Pauline Marois, réclame de son côté un peu de patience encore : il faudra probablement quelques jours ou quelques semaines avant qu’on puisse observer une amélioration de la situation actuelle dans les urgences, avertit-elle.

Mme Marois devrait annoncer demain les mesures concrètes dont pourront bénéficier bientôt les hôpitaux grâce aux 15 millions qu’elle a promis de réinjecter. Mais pour ce qui est de changements plus « profonds », il faudra plus de temps.

« J’espère que dans les jours et les semaines qui vont suivre, on va voir l’effet des mesures de court terme, a-t-elle expliqué hier en entrevue à La Presse. Et sur les changements un peu plus significatifs, évidemment, ça va être l’an prochain qu’on va en voir vraiment les effets. Faut pas se raconter d’histoires. »

La ministre affirme qu’il est faux de prétendre que le gouvernement applique le même « sparadrap sur le bobo » que Jean Rochon l’avait fait l’an dernier. « M. Rochon avait mis 15 millions, mais essentiellement dans le cadre d’un support aux régions en situation de verglas », dit-elle.

Depuis l’annonce des 15 millions, les régies régionales ont été appelées à dresser la liste de leurs besoins immédiats, attendue au cours des dernières heures. La ministre évoque l’ouverture de lits pour les personnes âgées, l’ajout de ressources alternatives pour les patients souffrant de maladies mentales, un meilleur soutien aux urgentologues, via par exemple des renforts de cliniciennes, et même la levée des quotas salariaux des médecins dans certains hôpitaux.

Et elle n’écarte pas que soit levée de façon limitée l’interdiction d’embaucher des infirmières retraitées, une interdiction que le chef libéral, Jean Charest, a qualifiée hier d’«absurde».

« Si c’est utile et pertinent, d’une façon ciblée, dit Pauline Marois. Mais je ne crois pas que ce soit un bon message à envoyer, de dire : on lève le tout. Les hôpitaux, partout, vont être débordés sans doute de demandes de gens qui aimeraient bien pouvoir revenir, à pour toutes sortes de raisons. »

Il n’est toutefois pas question de convoquer d’urgence l’Assemblée nationale afin que la Commission des Affaires sociales puisse débattre de ce problème, comme l’a aussi réclamé hier le chef libéral.

Mme Marois répète qu’il est « normal » qu’en janvier, février, mars et avril, il y ait une hausse de la fréquentation des urgences.

Tout au plus l’engorgement actuel, particulièrement visible au cours des derniers jours au CHUM, à Laval et dans les Laurentides, est-il « un peu plus » prononcé qu’à la même période ces cinq ou six dernières années, avance Mme Marois.

Le gouvernement se targue d’avoir réduit sensiblement le nombre de personnes qui passent plus de 48 heures aux urgences.

« On est passés de 60 000 à 8000 personnes qui attendent 48 heures et entre 1998 et 99, on est passés du double au simple, insiste Mme Marois. Montréal, c’était 1266 ; on est à 618. Dans les Laurentides, de 157 à 81. »

Quoi qu’il en soit, le chef libéral Jean Charest jugeait la situation suffisamment critique hier pour inviter le premier ministre Lucien Bouchard à tenir un « débat d’urgence » à l’Assemblée nationale sur la situation dans le réseau de la santé.

Selon M. Charest, le gouvernement doit mettre fin immédiatement aux compressions en cours dans la santé et recourir aux infirmières à la retraite pour parer au manque d’effectifs. Il suggère aussi d’ouvrir des lits de courte et de longue durée en nombre nécessaire « là où ça le requiert » et de stopper les projets de fusion d’hôpitaux et de consolidation des régies régionales.

M. Charest a aussi demandé au gouvernement de lever les plafonds de revenus des médecins comme cela avait été fait durant la campagne électorale alors que la grogne des médecins se répandait dans l’opinion publique.

Hôpital Victoria, la nuit. Photo de Megan Jorgensen.
Hôpital Victoria, la nuit. Photo de Megan Jorgensen.

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