Début du commerce en Nouvelle-France
Après 1550, c’est Tadoussac qui devient le comptoir le plus important d’Amérique du Nord-Est et c’est à Tadoussac que les Amérindiens rencontrent régulièrement les baleiniers et les pêcheurs européens. C’est son emplacement stratégique qui en fait le carrefour de plusieurs routes commerciales menant à l’intérieur du continent.
Selon le témoignage archéologique et historique, Tadoussac reçoit à la fin du XVIe siècle des fourrures qui, échangées de tribu en tribu, proviennent d’aussi loin que la baie James et sud de l’Ontario actuel. Vers 1600, certains commerçants français ont compris qu’une alliance avec les Montagnais leur permettrait de s’assurer une provision constante de fourrures et de déjouer leurs rivaux européens. En retour, une telle alliance exigerait de leur part le respect du rôle d’intermédiaire des Montagnais.
Les Français savent que d’énormes quantités de fourrures de qualité supérieure sont disponibles au nord du Saint-Laurent. Pour augmenter le volume de la marchandise et pour faire le commerce directement avec les tribus de l’intérieur du pays, il faut ouvrir le fleuve et en faire l’artère principale du commerce. Pour atteindre ces objectifs, il leur faut aider les Montagnais et leurs alliés à chasser les Mohawks de la vallée du Saint-Laurent.
Les marchands français se joignent alors à l’alliance inter-tribale formée et dirigée par les Montagnais pour refouler les Mohawks.
Au début pourtant leur participation se limite prudemment à la livraison d’armes de métal qu’ils fournissent aux tribus autorisées par les Montagnais à commercer à Tadoussac, afin qu’ils puissent résister plus efficacement aux Iroquois.
C’est François Gravé du Pont qui est l’architecte principal de cette stratégie. Il avait déjà fait le commerce des fourrures sur Saint-Laurent et s’était rendu jusqu’à Trois-Rivières.
Au cours de l’hiver de 1599-1600, Gravé du Pont aide Pierre de Chauvin de Tonnetuit, un riche marchand protestant de Honfleur, à obtenir du roi le monopole du commerce des fourrures le long du Saint-Laurent pour une période de dix ans. Chauvin s’engage en retour à y installer 500 colons à ses frais. La concession de ces privilèges relance la querelle entre les monopolistes et partisans du marché libre. Les adversaires du monopole qui comprennent les baleiniers basques, ainsi que les marchands de Saint-Malo, de Rouen et de La Rochelle, continuent à commercer clandestinement avec les Amérindiens. En outre, les profits du commerce des fourrures, bien que substantiels, ne suffisent nullement à financer une si vaste entreprise de colonisation et installer 500 colons.
Malgré les conseils de Gravé du Pont, qui trouve le site trop inhospitalier, et ceux de son associé Pierre du Gua de Monts, Chauvin décide de protéger son monopole, en faisant construire à Tadoussac un comptoir où il laisse hiverner seize hommes.
Onze des hommes de Chauvin meurent au cours du premier hiver. Ainsi, Chauvin abandonne le projet et Tadoussac redevient un comptoir estival.
Lorsque Chauvin meurt en 1603, son monopole passe à Aymar de Chaste, gouverneur de Dieppe, qui expire lui-aussi quelques mois plus tard. La même année Gua de Mont obtient pour une période de dix ans un nouveau monopole à condition d’y établir 60 colons chaque année. En effet, le peuplement de la région permettrait de mieux contrôler l’exploitation des fourrures dont les sources d’approvisionnement étaient très disperses.
On établit donc une colonie en 1604 à l’embouchure de la rivière Sainte-Croix (ce village sera déplacé en 1605 à Port-Royal, en Nouvelle-Écosse). En 1608, Samuel de Champlain est chargé de trouver un meilleur site sur le Saint-Laurent. Ainsi, les Français choisissent le site qui deviendrait la ville de Québec et y ouvrent un comptoir. Champlain et Gravé du Pont obtiennent la permission de fonder un établissement en amont du fleuve, en rappelant aux Indiens de Tadoussac les avantages d’une forte présence française parmi eux. C’est le vrai début de la colonisation du Canada.
Malgré la maladie et son grand âge, François Gravé du Pont continue à s’occuper activement du commerce des fourrures jusqu’en 1629 et il passe plusieurs hivers à Québec, fondé par Champlain en 1608. On attribue d’ailleurs à Gravé du Pont l’assignation des noms de lieu modernes qui remplacèrent la toponymie de Cartier sur la carte dessinée en 1603 par le cartographe G. Levasseur.
Références :
- Trigger, Bruce G., Les Indiens, la fourrure et les Blancs. Français et Amérindiens en Amérique du Nord, Boréal, 1985.
- Trudel, Marcel. Histoire de la Nouvelle-France, volume 1, Les vaines tentatives, 1524-1603, Montréal, Fides, 1963.

Lire aussi :
- Différents catégories de la population de la Nouvelle-France
- Avant l’établissement de la Nouvelle-France
- Fondation de la Nouvelle-France
- La traite des fourrures
- Tadoussac
- Biographie de Samuel de Champlain
- Biographie de François Gravé du Pont