Fort Saint-François-du-Lac

Fort Saint-François-du-Lac

Le 1er septembre 1687, le gouverneur Jacques-René Brisay, marquis de Denonville (1637-1710), réitère l’ordre aux habitants de la Nouvelle-France de construire, avec l’aide des troupes, des forts dans chaque seigneurie, pour servir de refuges aux personnes et aux bestiaux menacés par les Iroquois. C’est cette année-là qu’aurait été construit le fort de Saint-François-du-Lac. En l’absence de tout document qui permettrait de confirmer cette date, on croit toutefois que la date est très vraisemblable.

Le fort fut bâti sur une pointe, la Pointe-du-Moulin, à l’ouest de la plus grande des îles, qui pour a été appelée île du Fort. C’était une enceinte en forme de carré, palissadée en pieux de cèdre de quinze pieds de hauteur et flanquée de bastions en pierre aux quatre angles. L’enceinte renfermait des baraques pour les soldats, des remises et des ateliers.

Le site et le dessin du fort Saint-François-du-Lac sont indiqués sur la carte cadastrale exécutée, en 1709, par l’ingénieur du roi, Gédéon de Catalogne.

Le fort construit, on y posta une compagnie du détachement de la marine, sous le commandement du chevalier Charles-Henri de la Groix, capitaine, et on s’assura les services d’un maître-armurier, Jacques Jouïel, venu des Trois-Rivières. Au printemps suivant, la garnison du fort fut inspectée par le commandant des troupes du roi au Canada, le chevalier Philippe Rigaud de Vaudreuil. À l’occasion de sa visite, le 8 mai 1688, il fut parrain d’un enfant sauvage, à qui il donna le nom de Charles-Philippe (en fait, les registres paroissiales de Saint-François-du-Lac ont conservé les noms de plusieurs militaires ayant agi comme parrains à des baptêmes ou comme témoins à des mariages et des sépultures).

Le premier commandant du fort fut le capitaine Louis de Larue sieur de la Motte. En 1692, il fut remplacé par Jean-Joseph Girard sieur de Charlay et en 1693, le commandement du fort passa au lieutenant Antoine Planiol qui fit construire dans l’île Saint-Jean un autre fort. Les gardiens de ces deux forts se donnaient régulièrement signe de vie au moyen d’une colonne de fumée ou d’un coup de canon. Un jour, à l’heure habituelle, la fumée ne monta pas ou le canon resta silencieux dans l’île Saint-Jean et on sût par après que les Iroquois y étaient venus et avaient massacré les habitants.

Après le massacre de Lachine, perpétrée pendant la nuit du 5 août 1689, les Iroquois se répandirent dans les campagnes et y commirent les mêmes excès sur plusieurs points. Les registres de la paroisse de Saint-François portent la trace de leur passage : L’an 1689, y est-il noté, Jacques Julien, chrestien et catholique, fut tué par les Iroquois le 6 de novembre et fut enterré au cimetière, en présence de plusieurs François soldats qui ne scavaient escrire; six jours après sa mort on enterra le Bateur d’Antif, tué par les mesmes au mesme jour.

À la même occasion les Iroquois brûleront la chapelle locale : ils n’osèrent pas attaquer le fort de Saint-François, mais pour se venger, ils mirent le feu à la couverture de la chapelle en se servant de flèches ardentes.

On peut lire dans les registres paroissiaux de Saint-François des attestations comme celle-ci : « L’an 1690, le 18 de mai, Pierre Forcier te Jacques Vachet, qui avaient fait leurs dévotions deux ou trois jours auparavant, furent tués par les Iroquois, et ont été enterrés au cimetière de la paroisse de Saint-François-Xavier le lendemain de leur mort… »

Une bande de cent à cent vingt Agniers et autres Indiens opérèrent sur le territoire en septembre de 1690. Au cours de la matinée du 22 septembre, un valet du seigneur Crevier se rendait à son travail, quand il aperçut tout à coup quelques Iroquois dans le voisinage. Il courut vitement avertir les hommes du fort. Il y avait à ce moment-là une forte garnison, commandée par le sieur François de Galifet.

De plus, le capitaine Louis de Larue sieur de la Motte se trouvait dans les environs avec un détachement de vingt hommes (Frontenac avait fait deux détachements de troupes pour la sûreté des côtes du sud, qui avaient le plus à craindre. Le premier était commandé par le chevalier de Clermont et patrouillait la région située entre Montréal et Sorel. L’autre, sous le commandement du chevalier de la Motte, avait à surveiller la région allant de Saint-François vers Québec).

De la Motte arriva sur les lieux, vers les deux heures de l’après-midi, et décida d’aller attaquer la bande iroquoise. Il s’adjoignit un renfort d’une quinzaine d’hommes et le sieur de Murat, lieutenant de M. de Galifet, et descendit à travers les bois vers le lac, où les Iroquois avaient laissé leurs canots. Il en surprit une soixantaine qui s’étaient séparés des autres, et, grâce à une vigoureuse décharge, il les mit en déroute.

Mais les fuyards allèrent rejoindre le gros de la bande, et tous revenant ensemble vinrent fondre sur leurs assaillants.

Les soldats, qui s’étaient déjà éloignés les uns des autres, ne purent se rallier à temps et plièrent à leur tour. Ils tentèrent alors de regagner le fort à toutes jambes, mais seuls les meilleurs coureurs purent s’échapper.

Le capitaine de la Motte et 14 soldats furent tués, le lieutenant de Murat disparut on ne sait où, quatre ou cinq autres soldats demeurèrent prisonniers et furent amenés en captivité (la plupart furent rachetés dans la suite par les Hollandais). Quant aux Iroquois, on croit qu’ils perdirent 30 à 40 hommes).

La tradition veut que l’emplacement du fort ait disparu par suite de l’action érosive de l’eau.

(D’après Thomas-M. Charland. O.P. Histoire de Saint-François-du-Lac, Collège Dominicain. 95 Avenue Empress – Ottawa 1942, 3e impression – mai 2007. Société historique de la région de Pierreville avec la participation financière de la Caisse populaire Desjardins du Bas-Saint-François et la Municipalité de Saint-François-du-Lac).

prisonnier et iroquois
Un Amérindien ramène un prisonnier Source : Diane Boily / Site Édutic-UQTR, AKI : Sociétés et Territoires autochtones. Licence : Libre de droit pour une utilisation pédagogique.

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