Énergie hydraulique et le canal de Lachine

Ascension et déclin de l’énergie hydraulique et le canal de Lachine

L’utilisation de l’énergie hydraulique du canal de Lachine engendre une véritable révolution dans le paysage et l’économie de Montréal. Le système hydraulique du canal fonctionne si bien que le secteur est comparé à Lowell, célèbre complexe industriel textile de la Nouvelle-Angleterre.

À une époque où le charbon est encore coûteux et son approvisionnement, plus difficile, l’énergie hydraulique offre une belle solution aux entrepreneurs en raison de son faible coût et de sa grande accessibilité. Les usines en viennent cependant à surexploiter la ressource, entraînant ainsi une diminution du niveau d’eau dans le canal, qui crée à son tour des problèmes de navigation.

La popularité de l’énergie hydraulique décline à partir de la fin du XIXe siècle. En 1897, seulement une douzaine d’industries continuent de l’utiliser, alors que ce nombre diminue à sept en 1920. L’énergie hydraulique est peu à peu remplacée par le charbon, finalement offert à des prix compétitifs au Québec, et surtout par l’électricité., qui apparaît entre les deux grands conflits mondiaux comme source d’énergie dans le secteur industriel.

Quand le gouvernement voit grand

Inauguré en 1825, le canal de Lachine sert essentiellement de voie de navigation. Il est approfondi et élargi de 1843 à 1848 pour accueillir de plus gros navires, facilitant ainsi le transport des matières premières et des produits finis. À la suite des travaux d’agrandissement, le débit du canal augment considérablement et permet dès lors de produire de l’énergie hydraulique. Le gouvernement aménage alors trois sites où les usines pourront faire fonctionner leur machinerie grâce à cette nouvelle source d’énergie.

Le gouvernement loue les trois sites industriels du canal de Lachine à des entrepreneurs qui, à leur tour, les sous-louent à des entreprises. En 1851, le négociant John Young et le meunier Ira Gould obtiennent le bail de l’ensemble des lots hydrauliques (parcelles de terrain permettant d’exploiter l’énergie hydraulique du canal) du complexe éclusier Saint-Gabriel. Avec deux autres associés, ils fondent la St. Gabriel Hydraulic and Land Company et procèdent à l’aménagement des infrastructures d’entreprises. Pour maximiser leur investissement, ils fractionnent les sept lots hydrauliques prévus par le gouvernement en 17 lots. Ceux-ci trouvent rapidement preneurs: en cinq ans, le complexe industriel des écluses Saint-Gabriel est complet.

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Ces usines se trouvent près du bassin #2, dans le Vieux-Port de Montréal, autour des écluses #3 (écluse Saint-Gabriel) et près de l’écluse #4 (écluse Côte-Saint-Paul).

La popularité de l’énergie hydraulique décline à partir de la fin du XIXe siècle. En 1897, seulement une douzaine d’industries continuent de l’utiliser, alors que ce nombre diminue à sept en 1920. L’énergie hydraulique est peu à peu remplacée par le charbon, finalement offert à des prix compétitifs au Québec, et surtout par l’électricité., qui apparaît entre les deux grands conflits mondiaux comme source d’énergie dans le secteur industriel.

Dès 1847 apparaissent le long du bief #2 des établissements industriels attirés par le potentiel énergétique de l’endroit. Les 15 lots hydrauliques bénéficient d’une chute de 6 à 8 mètres entre leur façade sur le canal et le fleuve derrière. La force de l’eau entraîne les machines. Les usines forment à la longue un mur continu depuis le pont de la rue Mill jusqu’à l’actuelle autoroute Bonaventure. Minoteries et clouteries ressortent du lot. L’industrie des peintures et des vernis et la construction navale sont aussi représentées.

Énergie hydraulique : Apporter de l’eau au moulin

Succession d’usines comprises entre les rues des Seigneurs et Chatham qui bordent l’ancien canal de 1825. Le bas niveau de l’eau fait voir les pertius, ces grandes sections du mur du canal qui peuvent s’ouvrir pour laisser entre l’eau dans chaque usine. Dans ce secteur, le canal de 1825 a marqué l’architecture : il a imposé sa forme courbe aux bâtiments qui le longent. Cette partie du canal de 1825 est la seule, avec celle de Lachine, à témoigner du premieer canal.

La conversion de l’eau en énergie mécanique

L’élargissement du canal de Lachine en 1843 fait augmenter son débit d’eau. Elle peut produire l’équivalent de 1 714 chevaux-vapeur, ce qui est suffisant pour faire tourner les turbines des usines. Chaque lot qui permet d’exploiter l’énergie hydraulique du canal, appelé lot hydraulique, est alimenté grâce à un système de biefs (portions du canal comprises entre deux écluses). L’eau est dirigée vers les usines par un canal d’amenée. Pour les écluses Saint-Gabriel, le canal d’amenée est en fait l’ancien canal de 1825. Les pertuis, de grandes ouvertures percées dans les parois du canal, permettent ensuite à l’eau d’entrer à l’intérieur des édifices.

Énergie hydraulique : Un système caché

Une fois entrée par le pertuis, l’eau est dirigée vers les turbines de l’usine par des conduites, aussi appelées coursiers. Les employés sont les seuls témoins de ce système installé dans le sous-sol des usines qui permet la conversion de l’eau en énergie mécanique. Chaque entreprise possède, selon sa taille, une ou plusieurs turbines. À une certaine époque, les usines des écluses Saint-Gabriel utilisent en majorité des turbines de marque Leffel ou de marque Hercule.

Le bruit des machines

La turbine est reliée aux machines de l’usine au moyen d’un arbre de transmission. Ainsi grâce à un jeu d’engrenages, de poulies et de courroies. Ce système permet d’acheminer l’énergie produite par l’action de la turbine aux différents appareils de production disposés dans l’usine: machines pour polir les outils en métal et forger des marteaux, machines pour tisser la laine et la transformer en couvertures ou en habits, machines pour fabriquer et couper les clous. Leur variété est impressionnante et demeure à l’image de la diversité des usines qui se sont succédé sur le site.

Schéma illustrant le fonctionnement de la turbine et de la machinerie d’une usine qui utilise l’énergie hydraulique. L’énergie est transmise de la turbine aux divers appareils par u système de courroies.

Le canal de fuite et son usage

Après avoir actionné les turbines, l’eau est conduite à l’arrière des usines par des coursiers. Elle est alors rejetée dans un canal de fuite, qui l’achemine jusqu’au canal de Lachine, en aval de l’écluse. Le canal de fuite longe la rue Basin. Par la suite il traverse la rue des Seigneurs. Finalement il se dirige en oblique à l’arrière des usines de la Pointe-des-Seigneurs. Dans les années 1970, on remblaye la section du canal de fuite comprise entre la rue des Seigneurs et la rue Chatham. Aujourd’hui, seule la section qui délimite la Pointe-des-Seigneurs demeure visible. Elle sert maintenant de refuge à une faune variée composée de tortues, de canards et de castors.

Voir aussi :

Vue sur l’entrée des écluse Saint-Gabriel. La jonction du canal de Lachine et du canal de fuite forme la Pointe-des-Seigneurs. Sur laquelle se dressaient les bâtiments de la meunerie Ogilvie. Le canal de fuite (tail race) achemine l’eau rejetée par les usines. Il coule jusqu’au canal de Lachine et le pertuis de l’Ogilvie. Une grande ouverture pratiquée dans la paroi du canal permet l’écoulement de l’eau après son utilisation comme source d’énergie. Photo de GrandQuebec.com.
Les pertius. Photo de l’époque.
Turbines des manufactures. Gravure de l'époque.
Turbines des manufactures. Gravure de l’époque.

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