Déclaration d’indépendance de 1838
Déclaration d’indépendance de 1838 : Voici le texte de la déclaration d’indépendance du Bas-Canada (le Québec), lue par Robert Nelson en novembre 1838 à Napierville, devant quelque centaines de ses partisans.
Même si ce document est resté sans aucun effet, c’est quand même un fait historique non négligeable. En effet, c’était la première fois depuis la Conquête qu’on proclamait la volonté d’indépendance de la colonie.
Admettons que la déclaration contient des idées progressistes et inusitées pour l’époque : la séparation de l’Église et de l’État, la liberté de presse et de conscience, l’égalité des droits pour les Amérindiens, la restriction de l’application de la peine de mort, la confiscation des terres de l’Église et beaucoup plus. Voici donc le texte de la Déclaration d’indépendance :
Déclaration d’indépendance de 1838
– Vu que le pacte solennel fait entre le peuple du Haut et du Bas-Canada, enregistré dans le livre des Statuts du Royaume-Uni de la Grande-Bretagne et d’Irlande, le 31me Chapitre des Actes passés dans la 31me année du règne du Roi George III, a été continuellement violé par le Gouvernement Britannique;
– Vu que le même Gouvernement a foulé aux pieds et usurpé nos droits, qu’il a méprisé et fermé l’oreille à nos adresses, requêtes, protestes et démonstrations contre son intervention inconstitutionnelle et injuste dans nos affaires;
– Qu’il a disposé de nos revenus sans le consentement constitutionnel de la Législature locale, pillé notre trésor colonial, ordonné l’arrestation de plusieurs de nos concitoyens, et leur mise aux chaînes; jeté au milieu de nos campagnes des Armées de mercenaires, qui y ont semé l’alarme, l’effroi et la consternation.
* Déclaration d’indépendance de 1838
Que la même soldatesque a rougi notre sol du sang d’un nombre considérable de nos compatriotes, brûlé nos villages, profané nos temples, établi dans toute l’étendue du pays, le règne le plus atroce de la terreur;
– Et vu que nous ne pouvons plus souffrir ces violations réitérées de nos droits les plus chers et supporter patiemment les outrages et les cruautés multipliées et récentes du Gouvernement du Bas-Canada, NOUS, au nom du Peuple du Bas-Canada, adorant les décrets de la Divine Providence, qui nous permet de renverser un Gouvernement, qui a méconnu l’objet et l’intention pour lequel il était créé.
Et de faire le choix de la forme du Gouvernement la plus propre à établir la justice, assurer la tranquillité domestique, pourvoir à la défense commune, promouvoir le bien général, et garantir à nous et à notre postérité les bienfaits de la Liberté, civile et religieuse,
Déclarons solennellement :
Qu’à compter de ce jour, le Peuple du Bas-Canada est ABSOUS de toute allégeance à la Grande-Bretagne. Toute connexion politique entre cette puissance et le Bas-Canada cesse dès ce jour.
Le Bas-Canada doit prendre la forme d’un Gouvernement républicain. Le pays se déclare maintenant, de fait, République.
Que sous le Gouvernement libre du Bas-Canada, tous les citoyens auront les mêmes droit. Les Sauvages cesseront d’être sujets à aucune disqualification civile quelconque. Ils jouiront des mêmes droits que les autres citoyens de l’État du Bas-Canada.
Toute union entre l’Église et l’État se déclare abolie. Toute personne a le droit d’exercer librement la religion et la croyance que lui dicte sa conscience.
Que la Tenure Féodale ou Seigneuriale, est, de fait, abolie. Comme si elle n’eut jamais existé dans ce pays.
Toute personne qui porte ou portera les armes, ou fournira des moyens d’assistance au Peuple Canadien dans sa lutte d’émancipation, est déchargée de toute dettes ou obligations réelles ou supposées, envers les Seigneurs, pour arrérages en vertu de Droits Seigneuriaux ci-devant existants.
* Déclaration d’indépendance de 1838
Que le « Douaire Coutumier », est, à l’avenir, entièrement aboli et prohibé.
L’emprisonnement pour dettes n’existera plus. Sauf le cas de fraude évidente, que l’on spécifiera dans un Acte de la Législature du Bas-Canada à cet effet.
Que on ne prononcera la peine de mort que dans le cas du meurtre seulement. Pas autrement.
Toute Hypothèque sur Biens fonds, devra être spéciale. Pour être valide, devra être enregistrée dans des Bureaux. On les créera à cet effet par un Acte de la Législature du Bas-Canada.
Qu’il y aura liberté pleine et entière de la Presse dans toutes les matières et affaires publiques.
Le procès par jury est garanti au Peuple de l’État dans son étendue la plus libérale dans les procès criminels. Dans les affaires civiles au montant d’une certaine somme à déterminer par la Législature de l’État du Bas-Canada.
Que comme une nécessité et un devoir du Gouvernement envers le Peuple, on mettra en opération l’Éducation publique et générale. On l’encourager d’une manière spéciale, aussitôt que les circonstances pourront le permettre.
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Pour assurer la franchise et la liberté élective, toute élection se fera par le moyen du ballot.
Qu’aussitôt que les circonstances pourront le permettre, le Peuple choisira des Délégués. Cela suivant la division actuelle du pays dans les Villes, Bourgs et Comtés. Ces entités constitueront une Convention ou Corps législatif. Cela afin de baser et d’établir une Constitution, selon les besoins du pays. Aussi conformément aux dispositions de cette Déclaration, sujette à être modifiée suivant la volonté du Peuple.
Toute personne mâle au-dessus de l’âge de vingt-et-un ans aura le droit de voter ainsi que pourvu ci-dessus, pour l’élection des Délégués.
Que toutes les Terres dites de la Couronne, ainsi que celles appelées, réserves du Clergé, et celles qui sont nominalement en possession d’une certaine compagnie de spéculateurs en Angleterre, appelée « Compagnie des Terres de l’Amérique Britannique du Nord », deviennent de plein droit, la propriété de l’État du Canada, sauf telles portions desdites terres, qui peuvent être en possession de cultivateurs, qui les tiennent de bonne foi, pour lesquelles nous garantissons des titres en vertu d’une loi qui sera passée afin de légaliser la possession de tels lots de terres, situés dans les « Townships », qui sont maintenant en culture.
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Qu’on se servira des langues Française et Anglaise dans toutes matières publiques.
ET pour le support de cette déclaration et le succès de la cause Patriotique, que nous soutenons, NOUS, confiants en la protection du Tout-Puissant et la justice de notre ligne de conduite, engageons par ces présentes, mutuellement et solennellement les uns envers les autres, notre vie, nos fortunes et notre honneur le plus sacré.
Par Ordre du Gouvernement Provisoire,
Robert Nelson,
Président