Corporatisme au Québec

Québec a le droit d’établir le corporatisme

Maître Maximilien Caron le démontre, à une soirée d’action corporative

Dans une étude magistrale, dont les auditeurs ont réclamé la publication et la plus large diffusion, M. Maximilien Caron, professeur de droit à l’Université de Montréal et président de l’Action corporative, a établi, à la salle du Gésu, le droit, pour la province de Québec, d’accorder l’existence légale aux corporations et de leur conférer les privilèges qui leur reviennent. Il a aussi exposé de quelle façon ces corporations naîtront chez nous et quel sera leur fonctionnement.

Une telle étude ne se résume pas. En attendant qu’on en lise le texte complet en brochure, nous en donnons quelques passages caractéristiques.

Le conférencier aborde, dès le début, la question constitutionnelle :

« L’établissement, déclare-t-il, de l’organisation corporative s’avère beaucoup plus difficile en notre pays, que dans les contrées unitaires comme la France ou le Portugal. Nous vivons dans une fédération. Chaque citoyen canadien ressortit à deux autorités, également souveraines, chacune dans la sphère de sa juridiction. Ce qui compète à l’une n’appartient pas à l’autre. Très souvent, cette répartition des pouvoirs législatifs donne lieu à des disputes judiciaires. Effectivement, depuis plus de soixante-dix ans, nos tribunaux et le conseil privé ont dû trancher un grand nombre de semblables litiges. Leurs décisions sont très précieuses pour élucider notre premier point. Du reste, vous l’avez compris, celui-ci porte sur le droit public surtout. Je m’efforcerai de rendre cette étude aussi peu fastidieuse que possible. Elle offre, d’ailleurs, à l’heure présente, en elle-même, une grande importance. Personne ne devrait en ignorer, au moins les données générales.

Je vous soumets d’abord mes conclusions. D’après l’acte de 1867, tel qu’il est rédigé maintenant, en temps normal, seules les provinces ont la capacité constitutionnelle voulue, et une habileté suffisante, pour instituer, sur leur territoire, des corporations. Cette aptitude est essentielle à la survivance de notre groupe ethnique sur ce continent américain.

La corporation, avons-nous vu la dernière fois, se différencie de la simple association professionnelle, par l’autorité que lui délègue l’État. Qui dit corporation, dit pouvoirs réglementaire, disciplinaire, arbitral et administratif. Il s’agit, là, d’attributs inséparables de notre institution. Mais il s’agit là aussi, d’après la théorie du droit public anglais, que nous pratiquons, d’attributions qui appartiennent à la société civile. On peut contester l’absolu de cette thèse. En un point, toutefois, elle est juste. L’État doit avoir le monopole de la force ou de la discipline. Autrement, regnerait l’anarchie.

Et il n’est pas si évidemment faux que l’État ne doive pas aussi investir la corporation des autres droits énumérés. Dans l’ancienne France, le métier, comme entité juridique, émanait de la volonté royale. Il convient qu’il en soit ainsi. En effet, la corporation collabore à la poursuite de l’utilité commune dont l’État est le gérant. Il importe, par conséquent, que celui-ci l’habileté à agir, dans le sens qu’il juge le plus propre à atteindre les fins du bien général.

Une question préalable ou préjudicielle se pose à vous à cet endroit. La province peut-elle créer des organismes aptes à exercer les pouvoirs qu’elle tient de l’Acte de l’Amérique britannique du Nord ? Nous soulevons-là, en réalité tout le problème de la nature de la province elle-même. Il a fait l’objet de vives discussions. Pour le résoudre, l’on a fait appel à l’histoire et à la science du droit. Les uns prétendaient que les législatures locales tenaient leur autorité du parlement de Westminster. Celui-ci la lui aurait transmise en 1867. d’autres émettaient plutôt l’opinion que les provinces la tiraient de l’État fédéral. Les uns et les autres professaient que notre charte constitutionnelle avait été créée de toutes pièces, non seulement le présent régime politique canadien, non seulement l’État fédéral, ce qui est vrai, mais encore les provinces mêmes. L’Acte de 1867 aurait fait table rase du passé.

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On passe presque toute sa vie déguisé en adulte (Monique Corriveau). Photo : Megan Jorgensen.
On passe presque toute sa vie déguisé en adulte (Monique Corriveau). Photo : Megan Jorgensen.

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