Changement de régime

Changement de régime après la signature du traité de Paris

Le traité de Paris (10 février 1763) céda définitivement le Canada à l’Angleterre. En octobre, une proclamation royale réduisait le Canada français, désormais appelé Province de Québec, aux terres colonisées du bassin du Saint-Laurent moyen, et tous les pays de l’Ouest, déclarés territoire d’empire, furent soumis à la juridiction directe de la métropole anglaise.

Dès l’année suivante, les districts indépendants des Trois-Rivières et de Montréal furent abolis et leurs territoires assujettis au gouvernement de Québec. Cette concentration administrative supprimait tout conflit de pouvoirs possible et permettait au gouvernement anglais d’uniformiser sa politique coloniale.

Les Canadiens reçurent bénévolement la nouvelle de la paix; mais les sauvages reprirent leurs hostilités contre l’Angleterre. Moins de quatre ans après la conquête, un bataillon de Canadiens, dont la majorité étaient de Montréal, se joignit aux régiments anglais pour combattre les aborigènes des provinces de l’Est. Plus de 300 des nôtres s’enrôlèrent volontairement à cette occasion, et, commandés par M. de Rigauville, furent envoyés en garnison à Oswégo, où ils restèrent en service d’avril à novembre 1764. De retour à Montréal, le bataillon fut licencié avant d’avoir pris une part bien active contre le soulèvement des sauvages américains.

Assermentation

La résistance par les armes des sauvages à la domination pan-américaine des Anglais n’était pas de nature à rassurer le gouvernement sur l’indéfectible loyauté de ses nouveaux sujets canadiens; et l’on crut opportun d’exiger de la population française le serment dit d’abjuration et celui d’allégeance à la couronne britannique. Murray, pour se conformer aux instructions royales, nomma d’office, pour assermenter les gens dans les villes et les campagnes, Lewis Mettrai, Suisse français, Van Felson, Hugh Montgomery, Samuel Mather et d’autres moins connus. Mettral, à lui seul, reçut les serments des gens dans quarante-huit paroisses.

Il ne faut pas confondre le serment d’abjuration avec celui du Test, exigé des fonctionnaires, et que les catholiques ne peuvent prêter sans renier leur foi. Le premier était aussi mal vu de la population catholique française qui répugnait à souscrire à cette formule grossière, (Statutes at Large, Vol. V: An Act I Year, Geo. I: I do swear that I do from heart abhor, detest and abjure as impious and heretical that damnable doctrine and position that princes excommunicated or deprived by the Pope or any authority of the see of Rome may be deposed or murdered by their subjects or any other whatsoever. And I do declare that no foreign prince, person, prelate, state or potentate hath or ought to have any jurisdiction, power, supremacy, proeminence or authority ecclesiastical or spiritual within this Realm) l’obligeant à renier la suprématie du Pape sur les princes.

Plusieurs refusèrent de prêter ce serment malgré la menace d’expulsion du pays que pouvait amener leur refus, et l’autorité fut acculée à une impasse. Le 17 juin 1766, le grand vicaire Perreault demanda au gouverneur de surseoir à l’expulsion des récalcitrants; de son côté, le conseil exécutif déclara que bien que ceux qui ont refusé sont peu nombreux (?) l’ordre de les expulser serait l’occasion d’une très grande confusion. On décida d’attendre de nouvelles instructions royales avant d’agir. Il semble que personne ne fut inquiété dans la suite à ce sujet.

Avec l’établissement stable du régime anglais commence une ère nouvelle. Les Canadiens se sentiront désormais moins chez eux, réalisant chaque jour davantage que leurs droits de premiers occupants sont devenus caducs et qu’ils devront prendre titre nouvel dans cette patrie qu’ils ont pourtant fondée. C’est maintenant que les effets de la conquête commencent à se manifester, pour se continuer dans une longue suite de conflits et de rivalités.

La vie judiciaire, économique et politique fut profondément modifiée par les lois de l’État, la concurrence britannique et les luttes politiques.

(Histoire de Montréal par Camille Bertrand, archiviste, paléographe aux Archives nationales, tome deuxième (1535-1760).

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