La Couronne retire son accusation
Une bombe dans la campagne des conciergeries
L’hôtel Arbour : La Couronne demande elle-même à retirer son accusation contre Granata
La descente sensationnelle effectuée le 3 avril par la police provinciale à l’hôtel Arbour, 1057-58, boulevard Saint-Laurent, s’est terminée hier en vrai « poisson d’avril », devant le juge Amédée Monet, quand, après des ajournements répétés presque toujours à la demande de la Couronne, Me Jacques Fournier déclara au tribunal qu’il retirait l’accusation logée contre le tenancier Quintal Granata, qui d’après les hommes de Maître Philippe Aubé, avait tenu dans son hôtel « une maison de désordre ».
Hier, à l’ouverture de l’audience, Maîtres Lucien Gendron et Alphonse L. Patenaude, avocats de la défense, déclarèrent au tribunal qu’ils étaient prêts à procéder, et l’on suspendit l’audience cinq minutes pour attendre l’arrivée du procureur de la Couronne. Puis, au retour du juge Monte sur le banc, Me Jacques Fournier déclara, à la surprise générale :
- En lisant l’accusation, nous avons découvert que la date du supposé délit est le 3 mai, alors que la descente a été effectuée le 3 avril. Nous ne pouvons faire motion pour amender l’acte d’accusation et je déclare de suite que la Couronne abandonne cette poursuite contre Quintin Granata.
- Je demande à ce que l’acquittement du prévenu soit entré au procès-verbal, souligne aussitôt Me Lucien Gendron, et il n’est que juste de demander aussi la libération des personnes trouvées à cet endroit.
- Je désire déclarer cependant, continue Me Fournier, que les personnes trouvées seront soumises à la procédure ordinaire et que nous entendons procéder contre elles.
- Mais si la même erreur exista dans l’accusation demande le juge Monet. D’ailleurs, vous pourrez vous reprendre n’importe quand, si c’est si mal que ça à cet endroit.
- Ces personnes ne peuvent être tenues responsables d’un délit que n’a pas commis le tenancier, reprend Me Gendron et l’essence du délit, l’ « excuse légitime », où la trouver, lorsqu’il n’y a plus de délit contre le tenancier?
- Il n’y a pas de preuves contre le tenancier, insiste Me Fournier, mais ne peux abandonner l’accusation contre les personnes trouvées. Je demande trois jours au tribunal pour prouver au tribunal qu’il y a eu une maison de désordre à cet endroit.
Le juge Amédée Monet ajourna donc au 2 juin, puis fait enregistrer au procès-verbal que le prévenu est libéré faute de preuve, et que c’est à la suite de la déclaration de la Couronne que l’accusation logée contre lui est renvoyée.
(Journal Le Canada, mardi, 1er juin 1937, chronique judiciaire).
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