Un bétail ravageur

Un bétail ravageur

Il s’agit d’un classique de l’histoire des paysans du Québec: la bonne vieille chicane de clôtures qui a eu lieu le 13 octobre 1663… Le récit de ce procès sera bref, mais il donne l’occasion d’en apprendre un peu plus sur le sujet et de voir à quel point, au temps de nos ancêtres, les damnées clôtures ou le manque de clôtures servent de prétexte à de nombreuses chicanes et à des procès entre voisins.

Vincent Renaud n’apprécie pas du tout que le bétail de son voisin, Isaac Bédard, ait endommagé son champ de blé, et il intente une poursuite.

Originaire de La Rochelle, Vincent Renaud épouse Marie Martin en 1631; le couple aura dix enfants. Le recensement de 1666 stipule qu’il est habitant et cordonnier; sa terre est en bordure de la rivière Saint-Charles, à Québec.

Voisin de Renaud, Isaac Bédard est également natif de La Rochelle où il épouse Marie Girard; le couple arrive à Québec en 1661. En plus d’être agriculteur, Bédard exerce aussi le métier de charpentier. Il décède à Charlesbourg le 14 janvier 1689, âgé de 73 ans.

Bédard perd son appel et, dans son jugement, le tribunal le condamne à donner un demi-minot de blé à Renaud pour compenser les pertes, en plus d’une journée de travail à faire chez son voisin.

Le cas Bédard-Renauld n’est surtout pas isolé et anodin. Les ravages causés par des animaux dans des champs en culture deviennent un problème majeur. Plusieurs agriculteurs ont la mauvaise habitude de laisser paître leur bétail en toute liberté. Dans le but de corriger la situation, le Conseil souverain émet une ordonnance le 12 mai 1664: tout propriétaire dont les animaux causent des dommages aux cultures sera passible d’une amende de dix livres.

Mais la loi ne donne pas l’effet souhaité. Loin de s’améliorer, la situation ne fait qu’empirer au cours des années subséquentes. Cinq ans plus tard, soit le 19 août 1669, le Conseil vote une loi plus mordante pour « arrêter ces désordres et couper la racine à tant de procès. » De la fonte des neiges jusqu’après les récoltes, on ne veut plus de bétail en liberté. On mettra les animaux soit dans un endroit clôturé soit dans la commune, un terrain appartenant à plusieurs propriétaires. Non seulement on peut désormais capturer des animaux indésirables, mais on permet même « d’un tuer un en le faisan sur place ». Si le bétail cause des dégâts durant la nuit, l’amende sera de quinze livres et le troupeau sera saisi.

Par Guy Giguère, La Scandaleuse Nouvelle-France, histoires scabreuses et peu édifiantes de nos ancêtres, 1958.

Voir aussi :

bétail ravageur
Bétail ravageur. Illustration : Histoire-du-Québec.ca.

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