Biographie d’Emma Lajeunesse Albani
Marie-Louise-Cecilia-Emma Lajeunesse naquit à Chambly le 1er novembre 1847* et fut élève du Couvent du Sacré-Cœur de Montréal. Elle alla ensuite parfaire ses études musicales à Paris et à Milan. Elle également reçut une solide formation musicale à Montréal,
Elle fit ses débuts à l’opéra de Messine, Sicile, en 1870, dans «La Somnambula» de Bellini, et chanta ensuite à Florence et à Malte. C’est en mai 1872 qu’elle fit sa première apparition sur la scène du Covent Garden et conquit en une soirée le cœur des Londoniens.
Elle adopte Albani comme nm de théâtre à la suggestion de son professeur d’italien à cause de sa consonance italienne mais aussi pour rappeler qu’elle avait commencé sa carrière comme soliste à l’église de Saint-Joseph d’Albany, État de New York, de 1864 à 1868.
Depuis, elle a chanté dans de nombreux pays et est devenue l’idole de la scène lyrique. Elle fut une amie intime de la reine Victoria qui la combla d’honneurs et de faveurs, et son génie fut officiellement reconnu de par le monde. Après l’avoir entendue dans «Lohengrin» à Berlin, l’empereur Guillaume Ier la créa première cantatrice de sa maison royale. En fait, Emma Albani se signala dans les plus grandes capitales du monde, principalement en Europe, de même qu’au Metropolitan Opera de New York et au Canada. Elle eut l’occasion de côtoyer plusieurs souverains dont la reine Victoria, qui l’honorait de son amitié. Elle se produisit aux côtés d’aussi grands compositeurs que Brahms, Dovrak, Gounod, Liszt et Hans von Bülow.
Elle épousa, en 1878, Ernest Gye, fils du directeur de Covent Garden.
Elle abandonna la scène en 1912, à l’âge de 60 ans.
Plus de 10,000 auditeurs, parmi lesquels étaient Patti, sir Charles Stanley et bien d’autres célébrités, l’entendirent chanter pour la dernière fois le «Goodbye» de Tosti.
Depuis, Albani s’est activement occupée de ses nombreuses œuvres philanthropiques et de l’éducation des jeunes artistes de talent.
Elle est décédée à Londres le 3 avril 1930.
«Madame Albani, dit un journal anglais, restera célèbre non seulement comme cantatrice, mais comme une femme qui a conquis et gardé pendant toute sa longue carrière l’affection et l’estime des multitudes d’amis et d’admirateurs dans le monde entier. Elle restera l’une des plus brillantes figures musicales du vingtième siècle.»
«Elle fit honneur aux siens et fut compatissante pour les misères des autres, elle encouragea de son influence et de ses deniers les jeunes talents musicaux, elle nous fit partager les honneurs qui rejaillirent sur elle, elle ajouta un glorieux joyau à la couronne artistique canadienne».
(Texte, publié dans La Presse le 5 avril 1930).
* Voir le commentaire de Johanne Hébert : le texte d’article comporte quelques erreurs, par exemple, on a corrigé la date de naissance de Mme Albani d’après les remarques de Mme Hébert, mais on a laissé le reste du texte tel quel.
Quelques dates :
Biographie d’Emma Albani (extraits) dans l’Encyclopédie Canadienne :
1er novembre 1852 : Naît à Chambly Marie-Louise-Cecilia-Emma Lajeunesse, cantatrice (soprano) canadienne, devenue une célébrité internationale.
6 août 1878 : Emma épouse l’Anglais Ernest Gye, fils de Frederick Gye. Le couple aura un fils, prénommé Frederick-Ernest, l’année suivante.
24 juillet 1896 : Mme Albani chante dans un dernier opéra.
14 octobre 1911 : Mme Albani donne son dernier récital à Londres.
3 avril 1930 : Décédée à Londres.
Canton d’Albani
De forme presque triangulaire, le canton d’Albani, proclamé en 1965, est irrigué par la rivière Windigo et la rivière Windigo Ouest, affluents du Saint-Maurice qui lui sert partiellement de limite au sud-ouest. Inhabité et couvert de forêts, bien que traversé par une route menant à Windigo, il contient une foule de lacs de moyennes dimensions distribués sur un terrain montueux dépassant les 500 mètres d’altitude.
Le nom du canton honore Emma Albany.
Albani dans son jeune âge
Une des choses sur lesquelles M. Lajeunesse insistait beaucoup, dans les leçons qu’il donnait à sa fille, c’était la lecture à première vue. Il lui fallait déchiffrer toute la musique qui lui tombait sous la main ; une ouverture classique ou une polka de salon, une sonate ou une partition d’opéra réduite pour le piano. Elle avait pour ce travail une aptitude extraordinaire.
Emma Lajeunesse avait cela de commun avec notre pianiste distingué, Calixa Lavallée ; elle jouait un morceau par intuition ; elle devinait plutôt qu’elle ne lisait.
M. Lajeunesse était extraordinairement fier de ce talent ; mais il y avait surtout une chose qui le. transportait d’aise. « — Je lui mets sous les yeux, disait-il, une sonate de Beethoven, puis, lorsqu’elle en a déchiffré la moitié, je ferme le livre ; elle continue alors à improviser dans le même style d’une manière étonnante ».
Sa mémoire musicale était prodigieuse. Souvent, en faisant sa promenade, elle entendait jouer, par la musique militaire, un morceau qui la frappait. Elle l’écoutait, tout en causant, puis, revenue chez elle, elle écrivait la pièce d’un bout à l’autre pour le piano ou la harpe, et la jouait sur son instrument.
M. Lajeunesse lorsque sa fille eut acquis une certaine habileté, allait, de temps à autre, avec elle, dans les principaux villages des environs de Montréal, donner des concerts. Elle chantait, jouait le piano, la harpe et l’harmonium ; lui se chargeait de la partie de violon.
Sur tous ces programmes, il y avait une note qui invitait le public à présenter, entre la première et la seconde partie, un morceau ou deux que la jeune pianiste devait lire à première vue.
Elle s’est toujours tirée avec honneur de ce pas périlleux.
(Albani (Emma Lajeunesse. Par Napoléon Legendre).
Quelques souvenirs de Mme Albani
Depuis que j’ai commencé ma carrière, raconte Mme Albani, j’ai chanté dans des pays étranges. Une de mes expériences les plus remarquables a été au mariage royal en Russie.
Dans ce pays, les chanteurs sont considérés comme des serviteurs. C’était bien drôle ; nous étions tous sur une espèce de balcon au-dessus de la salle du banquet, et quand notre tour était arrivé, nous nous placions vis-à-vis une petite ouverture, et nous chantions. Ce qui m’a amusée le plus, c’est que, pendant que. nous faisions de notre mieux, le cliquetis des couteaux et des fourchettes ne cessait pas et, au beau milieu des passages les plus impressionnants, l’on entendait tout à coup, le son d’une trompette et un personnage quelconque se. levait et proposait une santé. J’ai été plus heureuse que Mme Patti, qui fut interrompue au milieu de son solo.
On m’a souvent demandé de chanter dans la chambre d’un mourant ou de personnes dangereusement malades. J’ai chanté pour le vieil évêque d’Albany quand il était malade.
Le premier Festival où je me sois fait entendre est celui de Norwich. Six ans après, y étant retournée, je reçus une lettre d’un vieux monsieur, qui voulait entendre La dernière Rose d’été ; je chantai cette belle romance, près de son lit de mourant ; c’est une scène que je n’oublierai jamais.
Plusieurs fois, j’ai été forcée au milieu de la nuit, longtemps après le concert, de sortir sur le balcon de l’hôtel où je logeais, et de chanter Home sweet home, ou quelque d’autre ballade populaire devant une foule qui se tenait dans la rue. Une fois, c’était à Dublin, les étudiants dételèrent mes chevaux, et l’on me dit que si je ne chantais pas on briserait les vitres de l’hôtel. Je parus sur la galerie, enveloppée de châles épais, car il faisait une nuit très froide. Ce n’était pas chose aisée que de chanter dans de telles circonstances.
(Monde Illustré XVII. Mme Albani).
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