Chronologie des femmes du Québec, de 1940 à 1949
L’époque de 1940-1950 constitue une période de transition dans l’histoire des femmes du Québec. La guerre et la prospérité retrouvée permettent à celles-ci d’échapper au rôle traditionnel qui leur était dévolu.
1940 : Marcelle Gavreau, scientifique et botaniste, se distingue en devenant la première femme à recevoir le prix de l’Association canadienne-française pour l’avancement des sciences.
1er mars 1940 : Le cardinal Rodrigue Villeneuve dénonce le projet de loi de l’Assemblée législative d’accorder le droit de vote aux femmes. Le cardinal explique sa position de la façon suivante : Nous ne sommes pas favorables au suffrage politique féminin, parce qu’il va à l’encontre de l’unité et la hiérarchie familiale ; parce que son exercice expose la femme à toutes les passions et à toutes les aventures de l’électoralisme ; parce que, en fait, il nous apparaît que la très grande majorité des femmes de la province ne le désire pas ; parce que les réformes sociales, économiques, hygiéniques, etc., que l’on avance pour préconiser le droit de suffrage chez les femmes peuvent être aussi bien obtenues grâce à l’influence des organisations féminines, en marge de la politique. Nous croyons exprimer ici le sentiment commun des évêques de la province.
25 avril 1940 : Les Québécoises obtiennent le droit de vote (depuis 1922, des groupes de femmes font pression pour réclamer le droit de vote. Année après année, les féministes regroupées dans ces deux associations iront à Québec demander le droit de vote). Cette fois-ci, le premier ministre libéral Adélard Godbout réussit à éteindre l’opposition des évêques en menaçant de démissionner et ce faisant d’être remplacé par l’anticlérical Télesphore-Damien Bouchard. L’opposition du clergé s’éteint.
1940 : La guerre mondiale incite les gouvernements à faire appel aux femmes pour qu’elles viennent travailler en usine. Leur capacité d’exercer tous les métiers est valorisée. Des stages en formation en mécanique, en soudure et en électricité leur sont offerts. Trois ans plus tard, les femmes au foyer sont encouragées à accepter des emplois à temps partiel. À Montréal, six garderies sont créées afin de faciliter le travail des femmes.
1er avril 1941 : L`Assemblée législative de la province adopte la loi sur l’admission des femmes au Barreau du Québec (ordre professionnel des avocats) et leur concède le droit d’exercer cette profession (mais les femmes n’obtiendront le droit d’exercer le notariat qu’en 1956).
29 avril 1941 : Le lieutenant-gouverneur du Québec, Sir Eugène Fiset, donne la sanction royale au bill voté à l’Assemblée nationale le 1er avril 1941 (v. cette date) qui accorde aux femmes le droit à la pratique juridique. Il a fallu 25 ans de revendications et d’efforts soutenus d’éminents juristes, des hommes politiques et des femmes énergiques pour permettre aux femmes l’accès au prétoire. Des revendications juridiques d’Annie Macdonald Langstaff en 1914 et 1915, en passant par la présentation du bill à sept reprises à l’Assemblée nationale, la lutte a été marquée par l’opposition farouche du clergé et soutenue par les journalistes et plusieurs intellectuels du temps.
13 janvier 1942 : Elizabeth Carmichael Monk est admise comme membre du Barreau du Québec, l’ordre professionnel qui regroupe les avocats de la province et qui existe depuis 1849. Maître Monk devient ainsi la première femme à exercer la profession d’avocat. Elle est suivie de Suzanne Raymond-Filion qui devient la deuxième femme à figurer au tableau de l’Ordre du Barreau du Québec. Le barreau ayant maintenu l’exigence du baccalauréat ès arts pour ses membres, il écartait toutes celles qui n’avaient pas eu la possibilité de faire leur cours classique.
11 juillet 1942 : Marcelle Hémond et Constance Garner Short sont admises comme membres du Barreau du Québec.
Mai 1945 : À la fin de la guerre, le premier ministre Mackenzie King annonce la distribution d’allocations aux mères. Au Québec, certains milieux s’effraient. Le gouvernement Duplessis y voit une ingérence du fédéral dans les champs de juridiction provinciale. Des juristes, des évêques, des prêtres et des nationalistes insistent pour que l’allocation soit versée au père, chef de famille. Duplessis fait faire des études par d’éminents juristes qui déclarent que cette nouvelle loi serait inconstitutionnelle parce qu’elle enfreint les droits du père, chef de famille et seul administrateur des biens de la communauté pour les couples mariés sous le régime de la communauté de biens. Thérèse Forget-Casgrain mènera une campagne contre cette position. On trouvera une astuce juridique : d’après le Code civil du Québec, la femme mariée a un mandat tacite, appelé mandat domestique, pour acheter ce qui est nécessaire aux besoins courants du ménage et donc, sur ce principe, elle peut encaisser l’allocation familiale. Grâce à Thérèse Forget-Casgrain qui se sert de son influence auprès de Mackenzie King, on modifie les plaques d’imprimerie moulées au nom du père, et un mois plus tard que les autres Canadiennes, les femmes du Québec reçoivent enfin leurs allocations familiales.
1945 : À la fin de la guerre mondiale, le gouvernement du Québec encourage les femmes à retourner au foyer. Les garderies publiques sont fermées.
1946 : Mary B. Jackson-Fowler devient la première femme à recevoir un diplôme d’ingénieure qu’elle obtient de la Faculté de génie de l’Université McGill.
1946 : Premières policières dans la ville de Montréal.
28 mai 1946 : Le gouvernement canadien annonce qu’il permettra aux familles néo-canadiennes de parrainer l’immigration de leurs proches parents. Un grand nombre de femmes arriveront au Canada à la suite de cette décision.
7 novembre 1946 : Le gouvernement fédéral annonce des mesures d’urgence pour aider la réinstallation des réfugiés et des personnes déplacées en Europe suite à la Deuxième Guerre mondiale. Cette mesure marque un tournant et un adoucissement de la politique d’immigration canadienne. Pas moins de 125 000 personnes de diverses origines entreront au Canada au cours de l’année 1947.
1947 : Avec l’entrée en vigueur de la Loi sur la citoyenneté canadienne, les Canadiennes qui épousent des non-Canadiens ne perdent plus leur citoyenneté.
1947 : L’écrivaine Gabrielle Roy devient la première Canadienne française lauréate du prix Fémina, l’un des plus prestigieux prix littéraires français.
1947 : Judith Jasmin est la première Québécoise à s’imposer comme grand reporter dans une profession traditionnellement dominée par les hommes et devient la première Canadienne correspondante à l’étranger.
1947 : Mae O’Connor est la première femme candidate à une élection au Québec, mais elle ne sera pas élue.
1948 : 1948 : Suzanne Coallier devient la première femme comptable diplômée au Québec.
1er mai 1948 : Assouplissement de la politique d’immigration canadienne. Le gouvernement libéral de William Lyon MacKenzie King décide de rendre plus flexibles les critères de discrimination utilisés pour la sélection des immigrants et la réunification des familles séparées par la Seconde guerre mondiale. King affirme que cette décision est nécessaire pour encourager la croissance de la population du Canada. Pour calmer les esprits douteux, King soutient que le nombre d’arrivant sera proportionnel à la capacité d’absorption de l’économie canadienne. Cette décision favorisera la diversification de l’immigration au Canada.
30 novembre 1948 : Yvette Brind’Amour et Mercedes Palomino, artistes et femmes d’affaires, fondent le Théâtre du Rideau Vert, premier théâtre permanent au Québec. Après plusieurs années d’itinérance, la troupe du Rideau Vert s’installera dans une petite salle à l’angle des rues Saint-Denis et Gilford de Montréal : le Stella. Certaines des œuvres produites révolutionneront la dramaturgie.

Pour en apprendre plus :