Zoociologie de l’ours blanc

« Zoociologie » de l’ours polaire

Depuis plusieurs années, le Service canadien de la Faune poursuit des études sur l’ours blanc. Le programme initial a surtout été orienté vers la localisation des tanières, mais aujourd’hui les chercheurs ont modifié leur approche pour se consacrer plutôt à l’étude de l’écologie et de l’éthologie des populations de l’ours polaire. Ces nouvelles recherches viennent combler un vide dans un domaine où les données étaient surtout anecdotiques et partiellement inexactes en raison des perturbations que les observateurs provoquaient sur les populations observées.

La plus spectaculaire méthode de chasse de l’ours blanc est celle où il poursuit, puis traque sa proie. M. Stirling a observé qu’il pouvait adopter deux modes d’approche : parfois il rampe en pliant l’échine, le museau au niveau du sol, se camouflant derrière les irrégularités du terrain, tantôt, il adopte l’approche rapide, traversant en vitesse les pièces d’eau qui le séparent de sa proie. Selon les observations de M. Stirling, même si l’ours blanc consacre près de 6 heures par jour à la chasse, il ne capture en moyenne, qu’un phoque à tous les 5 jours. Peu de chasseurs consentiraient à chasser pendant près d’une trentaine d’heures pour ne ramener qu’une seule prise. Évidemment, l’ours blanc n’as pas le choix ; c’est cette interminable chasse, néanmoins fructueuse, ou la disette. Il faut aussi noter que M. Stirling a fait ses observations au cours de l’été, alors que la fonte partielle des glaces offres au phoque un grand nombre de trous par où il peut remonter à la surface pour respirer. Il en va tout autrement en hiver, quand la glace a reprise et que les trous sont beaucoup moins nombreux, et que l’ours n’a qu’à attendre près de l’un d’eux pour capturer un phoque en pleine respiration.

Après la capture, nous dit aussi M. Stirling, l’ours traîne sa proie loin des bords de l,eau et le mord fortement au cou pour l’étrangler. Le festin qui suit peut durer d’une demi-heure à une heure, après quoi le chasseur abandonne sa victime. Les restes sont rapidement « pillés » par d’autres ours et il semble bien que ce soit là un atout important pour la survie des jeunes qui ne maîtrisent pas encore l’art de chasser de leurs parents.

Ses péripéties de chasse terminées, l’ours blanc se couche sur le flanc ou sur le dos et c’est le « repos de guerrier ». La durée de son sommeil dépend des habitudes de vie de sa proie favorite, le phoque.Ce dernier a l’habitude de sortir de l,eau et de s’étendre sur la glace durant l’après-midi, et peu souvent le matin alors qu’il se nourrit. Le matin, il demeure donc dans l’eau, en quête de nourriture, et remonte périodiquement en surface pour respirer. Comme l’ours blanc semble préférer la chasse à l’affût à la chasse en poursuite, c’est le matin qu’il consacre à cette activité, alors que la probabilité de voir un phoque faire surface, pour respirer par un trou dans la glace, est à son maximum.

Même bien nourri, l’ours blanc n’est pas très sociable. Les ours qui ne se connaissent pas s’évitent presqu’automatiquement. La vue n’étant pas très développée chez cet animal, c’est la grande acuité de son odorat qui semble lui indiquer qu’il doit faire connaissance avec l’étranger, ou passer son chemin. Lors de ces rencontres, M. Stirling a noté qu’un mâle seul a généralement préséance sur une femelle accompagnée de son ourson et que ces deux derniers doivent céder la place au mâle.

Grâce aux patients observations de M. Stirling, les habitudes de cette grande race des « seigneurs blancs » du Nord québécois nous sont maintenant un peu mieux connues. Il reste maintenant à poursuivre les travaux pour déterminer jusqu’à quel point l’activité de plus en plus intense de l’homme dans le Nord affectera la vie de ces bêtes.

(Tiré de la revue Québec Science, janvier 1975).

Voir aussi :

Ours polaire
Ours polaire dans le zoo de St-Félicien. Photographie de GrandQuebbec.com.

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