Le long sommeil de l’hiver d’un ours noir
Chaque année de la vie d’un ours commence et finit avec l’hiver. Aussi, pour s’adapter à ces longs mois de froidure, où la nourriture est rare, l’ours a trouvé un moyen : il tombe dans un très long et très profond sommeil. Pendant longtemps, on a cru que l’ours noir hibernait durant l’hiver. Il n’est est rien. Dans la vraie hibernation, l’animal a très peu de contrôle sur la température de son corps, ce qui fait que certains animaux peuvent connaître des baisses de température pouvant atteindre 15 degrés C pendant l’hibernation. Leur métabolisme est aussi réduit au strict seuil de survivance. Le métabolisme de l’ours noir diminue également, mais beaucoup moins. En fait, s’il n’en était pas ainsi, la croissance des oursons dans le ventre de leur mètre cesserait durant toute cette période et, s’ils parvenaient malgré tout à terme, ils mourraient de froid ou de faim. Au lieu de cela, l’ours entre simplement dans un état profond de léthargie prolongée. La température de son corps peut descendre jusqu’à 4 degrés C et sa respiration ralentir jusqu’à deux à quatre inspirations à la minute.
Ce ralentissement d’activité et cette baisse du métabolisme expliquent pourquoi l’ours peut passer tout un hiver sans s’alimenter et pourquoi il consacre tant de temps à manger pendant le reste de l’année afin d’accumuler les réserves de graisse dont il aura besoin pour tenir tout l’hiver. On a fait une expérience, celle de capturer et de peser un animal, avant et après la période de sommeil. Il s’agissait d’une jeune femelle. Elle pesait 106 kg à la fin de l’automne, et 70 kg au début du printemps ; elle n’avait donc perdu que 36 kg après avoir passé plusieurs mois sans manger, et semblait plutôt en bonne santé.
La durée de la période de sommeil varie selon la latitude. Les ours du Yukon peuvent passer jusqu’à six mois dans leur tanière, alors que ceux du sud de l’île de Vancouver peuvent très bien ne pas hiberner du tout, à cause du climat très doux.
Un abri sûr et sec
Lorsqu’il s’agit de choisir un abri, les femelles, surtout si elles attendent des petits, sont beaucoup plus difficiles que les mâles. Elles commencent à chercher longtemps avant la première neige. Elles veulent un endroit sûr, où elles pourront dormir tranquillement et, le cas échéant, mettre bas. Cela pourra être une grotte, une crevasse dans le roc, un tronc creux, une souche retournée ou un tas de bois, ou encore l’abri formé par les branches du bas de certains conifères – en fait n’importe où pourvu qu’il s’y forme une bonne accumulation de neige et que l’eau s’écoule bien, de façon qu’elles puissent dormir bien au sec. Elles tapisseront alors le sol de leur abri d’une litière confortable faite de mousse, de feuilles et d’herbe.
Quant aux mâles, ils vagabondent généralement jusqu’à la première neige, et c’est seulement alors qu’ils se mettent sérieusement en quête d’un abri. Idéalement, ils cherchent exactement la même chose que les femelles, mais s’ils ne le trouvent pas, ils peuvent aussi bien se contenter de s’allonger par terre, au milieu de la tempête, et laisser la neige s’accumuler autour d’eau, la chaleur dégagée par leur corps ne tardant pas à creuser une cavité dans la neige, formant une sorte de tanière. Pour se protéger du danger, le mâle attendra toujours qu’il neige pour entrer dans sa tanière. De cette manière, la neige fraîche effacera la trace de ses pas, qui pourraient attirer un agresseur.
Les ours peuvent être réveillés par un gros bruit, et, lorsqu’il y a des périodes de temps doux en plein hiver, on les a déjà vus sortir de leur tanière, se promener autour et s’étirer comme s’ils évaluaient le temps qu’il leur restait encore à passer dans leur abri.
Au printemps, les ours se réveillent quand la température s’adoucit et que la neige fondante et l’eau froide envahissent peu à peu le sol de la tanière.
On sait que pendant la période immédiate qui précède et qui suit l’hibernation, l’ours noir fait très peu de cas de la nourriture. Cette absence d’appétit est causée, à la fin de l’automne, par une importante accumulation de graisse dans la cavité abdominale, causant une contraction de l’estomac. La déshydratation produite par la longue hibernation rétrécit les muscles de l’estomac, ce qui en diminue considérablement le volume quand vient le printemps.
Après avoir quitté la tanière, l’ours recommence lentement à s’alimenter (de pousses nouvelles et de bourgeons), et boit beaucoup d’eau, ce qui contribue à ramener son estomac à son volume normal. C’est à ce moment-là que commence sa mue annuelle et, avec sa fourrure touffue renouvelée, il entame une nouvelle année de sa vie.