LES ÉLÉPHANTS CAMBRIOLEURS ((ce texte curieux a été publié dans la presse québécoise le 31 mai 1907)
Trois éléphants se baladaient, c’est le cas de le dire, lorsque le 30 mai 1907, les pachydermes du professeur Thompson ont brisé leurs entraves dans le parc temporaire du Stadium et sont allés, bien tranquillement, sans barissement féroce, dévaliser une boulangerie de la rue Rivard dont le four donne sur une ruelle, vis-à-vis le Stadium de Montréal.
Le vent d’ouest apportait aux éléphants enchaînés des effluves douces de pain frais dont tout barisseur respectable raffole. «Le vent qui soufflait à travers la montagne rendit fou» le benjamin de la troupe qui se contenta d’enlever, d’un coup de trompe, le pieu qui retenait la chaîne au sol, et il renversa la clôture pour aller déguster la fraîche pâte de l’excellente boulangerie.
Les gardiens coururent pour arrêter le voleur, mais deux autres éléphants profitèrent de l’occasion pour suivre la même route, et la boulangerie fut envahie en peu de temps. Trente pains furent entrompés et disparurent dans les estomacs éléphantesques avant que les cornacs eussent réussi à faire entendre raison aux goinfres.
M. Thompson a payé les dégâts et les éléphants ont été ramenés au parc du Stadium. Ces animaux sont nourris au foin et au pain frais. C’est pourquoi le voisinage de la boulangerie leur a donné tant de désirs gargantuesques. Comme ils n’ont pas eu d’indigestion, ils donneront leurs représentations de bêtes savantes au Stadium comme d’habitude.
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