Caribou de la rivière George

Le royaume menacé du tuktu

La rivière George, où s’abreuve la plus imporsante harde de caribous migrateurs du monde, pardra peut-être un jour le titre qu’elle détient. En effet, le tuktu, ainsi nommé en langue inuit, vit des heures pénibles dans tout Nunavik, fait face à une situation encor plus menaçante dans la région de la George. Plusierus études sont menées à l’aide de colliers émetteurs qui transmettent tous les 4 à 5 jours la position exacte d’une trentaine de carbous des différents troupeaux du nord du Québec.

Depuis 1991, la Société de la faune et des parcs du Québec suit les caribous à la trace en collaboration avec diverds partenaires, dans le but d’assurer la conservation et le mieux-être des immenses populations de caribous nordiques. Selon les résultats préliminaires de l’inventaire de 2001, compilés grâce au système satellitaire Argos (géré conjointement par la France et les États-Unis), le troupeau de la rivière George compterait environ 440 000 bêtes. Le nombre impressionne sans doute; il n’en confirme pas moins une chute de 45% par rapport à l’inventaire précédent de 1993. Curieuse coïncidence, le troupeau de la rivière aux Feuilles aurait plus que doublé depuis 1991, passant de 260 000 à 550 000 bêtes.

Contrairement à ce que l’on peut croire, ce n’est pas l’habitat d’hiver mais bien le site estival qui lèse les caribous de la George. Le troupeau, qui ne comptait pas moins de 800 000 têtes dans les années 1980, a pratiquement dévasté la végétation de cette aire de mise bas. La biomasse de lichen et de plantes vasculaires dans le territoire fréquenté par le caribou se révèle plus faible à 90% pour le lichen et à 25% pour les plantes vasculaires, que la biomasse des sites témoins. Par conséquent, entre le vêlage à la mi-juin et l’apparition des feuilles à la mi-juillet, les caribous sont littéralement cobdamnés à jeûner. Les femelles disposent de réserves adipeuses d’à peine 2 kg utilisables au moment de la mise bas et à peu près nulles un mois plus tard.

Selon toute vraisemblance, même avec un couvert d’environ 20 000 kilomètres carrés, l’aire estivale du caribou ne suffit pas à sustenter la harde. Les lichens et les bouleaux glanduleux qui la caractérisent sont des espèces peu résilientes au broutement et au piétinement; les plantes vasculaires ne parviennent pas à coloniser le sol privé de lichen, alors que les caribous s’entêtent à revenir chaque année sur les plateaux de la rivière George. Nonobstant leur fidélité au site, les grands cervidés courtent peu à peu leur séjour au bord de la rivière, au profit du territoire hibernal beaucoup mieux pourvu où ils refont leurs forces. La superficie de 700 000 kilomètres carrés de l’habitat d’hiver accueille conjointement le troupeau de la George et celui de la rivière aux Feuilles qui semble pour l’instant en pleine expansion.

Même d »nombré encore par certaines de milliers, le tuktu du Nunavik maintient un équilibre fragile avec l’environnement. La Société de la faune et des parc du Québec se préoccupe de l’état des troupeaux et prépare un plan de gestion du caribou nordique en étroite collaboration avec les groupes autochtones concernés par cette ressource. La compilation des études et la mise en œuvre des mécanismes de gestion adéquats éviteront peut-être aux troupeaux une autre phase de déclin plus dramatique encore.

Caribou
Caribou. Photographie de GrandQuebec.com.

À propos du caribou

Le Nunavik abrite trois grands troupeaux de cariboux nordiques (Rangifer tarandus) pour un total de plus de 1 million de têtes. L’espèce se nourrit et se reproduit dans cette région froide apparemment déserte. Il n’en a pas toujours été ainsi. À l’époque où les glaciers recouvraient le nord du Canada, le caribou colonisait plutôt la région des Grands Lacs. Le retrait graduel de ces glaciers le força à prendre la route du nord et à s’établir dans la taïga et la toundra québécoises.

Le caribou mâle atteint un poids maximal de 270 kg et la femelle, plus petite de 160 kg. Les deux sexes, fait assex rare, possèdent chacun un panache; celui du mâle, polus développé, peut mesurer 120 cm d’envergure. La subsistance du caribou est assurée en majeure partie par le lichen, les feuilles des arbustes ou des arbres, des champignons, des graminées et des mousses. Dépendante de la situation géographique et de la saison, la composition précise de son régime alimentaire peut varier considérablement.

Le comportement grégaire du caribou l’incite à former des hardes de 10 à 50 individus. Durant les grandes migrations, on assiste à la formation de troupeaux regroupant des milliers d’individus. Dans son milieu naturel, l’espèce vit en moyenne de 12 à 15 ans. L’homme, le loup, le coyote et l’ours noir sont ses principaux prédateurs. Le lynx du Canada, le carcajou et l’aigle royal s’attaquent parfois aux jeunes. Le caribou atteint la maturité sexuelle lorsqu’il a de 18 à 30 mois. Sa vitesse à la course peut atteindre jusqu’à 80 km/h. À la nage, elle ne dépasse pas 10 km/h.

La période de rut s’étend normalement d’octubre à novembre. Après une gestation de 7 à 8 mois, la femille donne naissance à un seulk petit. Le nouvau-né ne mesure que 60 cm de long et pèse de 4,5 à 7,8 kg. Dans moins de 30 minutes il se tiendra sur ses pattes, déjà prêt à chercher sa nourriture dans l’environnement 2 semaines plus tard. Après la mise bas, les femelles regagnent le troupeau qui, durant l’été, broute les pâturages éloignés des zones marécageuses infestées de moustiques. L’automne venu, la harde regagne la forêt où elle se met à l’abri du vent hivernal. On estime que le caribou du Québec, particulièrement les femelles du troupeau de la rivière George, parcourt jusqu’à 6 000 km par année, à la recherche de nourriture ou d’un abri contre les insectes et les prédateurs, un exploit unique pour un animal terrestre. On n’ose imaginer la tâche harassante des nomades du Nord qui s’appliquaient à suivre, au fil des mois, le précieux animal dispensateur de viande et de fourrure.

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