Les amphibiens et les reptiles de la vallée du Saint-François
La vallée du Saint-François abrite plus de 15 espèces d’amphibiens et six espèces de reptiles indigènes du Québec. Cette relative diversité d’amphibiens s’explique par la situation géographique et la douceur du climat, par la quantité d’habitats diversifiés et des secteurs encore peu perturbés. En revanche, la faible diversité des reptiles, comparativement à celles de a Montérégie et de l’Outaouais, s’explique en partie par la barrière qu’opposent les Appalaches à leur dispersion. Quatre espèces d’amphibiens et une espèce locale de reptile figurent sur la liste des espèces susceptibles d’être désignées menacées ou vulnérables : la salamandre sombre du nord, la salamandre pourpre, la salamandre à quatre doigts, la grenouille des marais et la tortue des bois.
Une traversée pour amphibiens
Un grand nombre d’amphibiens passent la majeur partie de leur vie au sec, surtout durant l’hiver. Au printemps, la période de reproduction signifie pour eux l’urgence de retourner à l’eau pour l’accouplement et la ponte des œufs. Le voyage vers ce point d’eau peut durer quelques jours, couvrir plusieurs kilomètres et nécessiter la traversée périlleuse d’une ou de plusieurs routes. À l’approche de l’hiver ou après un séjour plus ou moins long dans le marais, les amphibiens repartent vers l’abri des sous-bois, à l’écart des zones inondables.
Depuis la construction de la route 220 qui longe partiellement le marais du lac Brompton, des milliers de grenouilles, de crapauds, de salamandres, de tritons, sans oublier les tortues, trouvent la mort pendant la migration annuelle que les soumet au trafic routier entre la forêt et le marais. Dans cette zone limitrophe, les voitures roulent à plus de 80 kilomètres/heure. Sollicités par les premières pluies chaudes de juin, environ 200 animaux par heure sont écrasés dans les secteurs les plus achalandés.
Le constant de l’hécatombe a inspiré à l’Association pour la protection du lac Brompton le projet d’une traverse pour amphibiens. Cette initiative remarquable vise le maintien de la biodiversité des milieux humides. Troisième réalisation du genre en Amérique du Nord, après celles du Massachusetts et de la Californie, le tunnel pour amphibiens du marais du lac Brompton a accueilli ses premiers « itinérants » au printemps 2001.
Trois années d’étude et de sensibilisation de la population ont permis d’amasser les fonds nécessaires auprès d’organismes environnementaux et gouvernementaux et d’aménager trois passages souterrains sous la route 220. De chaque côté, les barricades en forme d’entonnoirs dirigent les animaux vers les tunnels, leur permettant de traverser la route en sécurité au printemps et à l’automne, dans un sens comme dans l’autre. Grâce à cette action écologique, les amateurs riverains du marais du lac Brompton bénéficieront, au cours des décennies à venir, des concerts de plus en plus réjouissants de leur chorale en pleine effervescence.
La situation observée au lac Brompton n’a rien d’exceptionnel au Québec; des centaines de routes menacent la migration des amphibiens dans presque toutes les régions. Si l’on compare la longévité naturelle et l’activité des ratons laveurs et d’autres prédateurs au rôle joué par la circulation des voitures, la sélection accidentelle s’avère extrêmement sévère et porte gravement préjudice à la faune palustre du Québec, voire de l’Amérique du Nord.
Il reste à souhaiter que d’autres municipalités offriront des passages protégés à ces espèces fragiles mais essentielles à l’équilibre des écosystèmes. Quoi faire en attendant? Avertis comme elles par les premières pluies printanières, adoptons une conduite prudente et respectons une limite de vitesse qui nous assure de collaborer au sauvetage des amphibiens et des reptiles de nos régions.
Des pondeuses en péril
Les amphibiens ne sont pas seuls à affronter le danger de la circulation routière. Près des marias, les tortues peintes et les couleuvres serpentins connaissent aussi des difficultés du même ordre. Rappelons qu’elles ont besoin d’en emplacement sec sur la berge pour y pondre leurs œufs. Plusieurs se retrouvent fatalement sur l’accotement dont la zone de gravier présente les conditions requises pour l’installation de leurs nids.
Toutes les conditions, moins une… Le site de nidification se trouve à quelques centimètres à peine des voitures qui filent à vive allure. Plusieurs pondeuses sont ainsi fauchées avant ou pendant la ponte. Les nouveau-nés sont menacés du même sort quelques mois plus tard. Certaines localités et groupes de protections ont mis en place des mesures de préservation des tortues, ou prévoient le faire. Les initiatives incluent la création d’ilots de nidification à proximité des marais et l’érection de clôtures ayant pour but d’empêcher la migration des tortues vers les routes.