Québec sans pétrole en 2030

Québec sans pétrole vers 2030 ?

L’Association Équiterre a lancé l’appel d’évaluer la situation actuelle concernant le pétrole, première source d’énergie au plan mondial et dont les projections prévoient une augmentation constante de la demande mondiale. Aujourd’hui, la plupart d’analystes son d’avis qu’un peu partout, le pétrole des prochaines années sera convoité et dispendieux, utilisé à des fins géopolitiques et sujet aux interruptions d’approvisionnement.

Le Québec est à la merci des prix internationaux. Pour Équiterre, alors, diminuer la dépendance du Québec au pétrole afin de protéger son économie et lutter contre les changements climatiques, tout en augmentant la qualité de vie et la compétitivité, est de l’importance stratégique.

Équiterre a étudié donc la situation mondiale en matière de disponibilité actuelle et future du pétrole, établissant un scénario réaliste de prix de plus en plus élevés et de difficultés d’approvisionnement  grandissantes. L’association a situé le Québec dans ce contexte, a analysé la provenance des importations, l’utilisation et le coût de plus en plus important de ces importations sur l’économie de la province. L’organisme a proposé des chantiers à mettre en œuvre afin de réduire la dépendance du Québec et en tirer des bénéfices importants.

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En moyen, le pétrole s’en consomme aujourd’hui plus de 30 milliards de barils par année, soit quelque 85 millions de barils de pétrole par jour (mbl/j). En 2030, le monde en consommera quelque 106 mb/j. Il faudra alors découvrir et mettre en exploitation l’équivalent de six fois la production totale actuelle de l’Arabie Saoudite afin de compenser le déclin des champs pétroliers et de combler la hausse de la demande.

Même dans un contexte de récession mondiale, les prix du pétrole s’élèvent toujours à des niveaux beaucoup plus élevés qu’au tournant du siècle. Les projections des agences énergétiques mondiales placent le prix moyen du baril de pétrole autour de 90-110$US à l’horizon 2015, projections jugées conservatrices. Ces prix mèneraient à un changement profond de  l’environnement  économique et énergétique mondial.

Ce contexte pétrolier mondial pose un défi de taille à la société québécoise. Effectivement, le Québec s’est développé sur un modèle économique de disponibilité du pétrole à bon marché. Les Québécois sont de grands consommateurs de pétrole. Selon Équiterre, en 2007, nous en consommions 135 millions de barils. Le pétrole et les produits pétroliers comptent pour plus de 37 % de toute l’énergie consommée au Québec, presque autant que l’électricité – environ 40%. Au Québec le pétrole est utilisé comme source d’énergie sous diverses formes (essence, mazout, diesel, propane). C’est le pétrole qui fait fonctionner le parc automobile et les transports collectifs. Il sert au chauffage, à la production d’énergie d’appoint, au fonctionnement de l’équipement agricole et dans les procédés industriels. Le pétrole sert à des fins non énergétiques, pour le pavage des routes notamment et comme intrant dans une foule de produits de consommation.

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Au plan environnemental, l’utilisation de pétrole est l’une des sources principales des émissions de gaz à effet de serre qui sont responsables du dérèglement du climat. L’Agence internationale de l’énergie estime que l’exploitation et la combustion du pétrole sont responsables de plus de 20% du total mondial des émissions de gaz à effet de serre (GES). Équiterre estime donc que tout effort crédible de lutte aux changements climatiques doit incorporer des mesures de diminution absolue de la combustion mondiale de pétrole.

Le pétrole consommé au Québec est entièrement importé. Les importations de pétrole brut du Québec proviennent de la Norvège et le Royaume- Uni, à partir des champs de la Mer du Nord, aujourd’hui en déclin. Le Québec importe de plus en plus de l’Afrique, notamment, de l’Algérie, de l’Angola et du Nigeria -, des côtes de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse, de même que du Mexique, du Venezuela, de l’Arabie Saoudite, de la Russie et d’autres pays. Équiterre estime que cette véritable hémorragie de capitaux québécois ne cessera pas au cours des prochaines années.

Équiterre estime qu’il est possible de diminuer la vulnérabilité de la province par la mise en œuvre de grands chantiers qui permettront de diminuer la dépendance au pétrole, améliorer la compétitivité et la qualité de vie de la société québécoise.

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Équiterre propose que d’ici 2030, un aménagement urbain se réalise qui permette à la majorité des familles québécoises de combler leurs besoins en produits et services essentiels à moins de 500 mètres de leur lieu de résidence. L’organisme estime que 80% des Québécois doivent disposer en 2030 d’une alternative abordable et attrayante à la voiture solo et que les grandes villes québécoises soient reliées par un réseau efficace de trains. Équiterre souhaite une réduction du kilométrage moyen des aliments disponibles en épicerie à un rayon de 500 km. L’organisme propose une conversion de 90% des systèmes de chauffage au mazout vers des formes d’énergie renouvelables.

Le Québec pourra-t-il se priver de pétrole dans 25, 30 voire 50 ans? C’est tout à fait possible, mais il faudra alors muscler le développement de l’hydroélectricité et des éoliennes et surtout, être moins gourmand en énergie. D’ici 2030, il faudrait consommer moins d’énergie et augmenter les sources d’énergie renouvelables que sont l’hydroélectricité, les éoliennes, l’énergie solaire et la biomasse. Pour atteindre un tel objectif, il aura besoin de beaucoup plus d’éoliennes. Il faudrait aussi de nouveaux barrages hydroélectriques. Autrement dit, un Québec sans pétrole aurait certes moins de gaz carbonique, mais davantage de rivières aménagées et de paysages peuplés de tours d’éoliennes.

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Un Québec sans pétrole signifierait une utilisation plus grande des transports collectifs et le besoin d’une solution de remplacement concrète aux moteurs à explosion qui alimentent nos voitures: huiles pyrolytiques, éthanol cellulosique, électrification des voitures, etc.

Bref, l’indépendance pétrolière du Québec en 2030 suppose un objectif ambitieux d’économie d’énergie. Le défi est grand, mais il y a encore beaucoup de place au Québec pour l’efficacité énergétique et la diminution de la consommation d’énergie.

Patrick Déry, auteur de l’étude sur le projet Québec sans pétrole vers 2030, abonde dans son sens: «C’est ambitieux, mais avons-nous le choix? Il faut prendre de telles décisions avant de se les faire imposer». En tout cas, il s’agit d’un vaste projet de société qui deviendra un enjeu crucial au cours de prochaines décennies.

Pour plus de détail sur le projet : Équiterre.org.

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Sunrise. Le lien démocratique est de même nature que le rayon solaire (Victor Hugo).  Image : Megan Jorgensen.

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