Origine du mot poubelle

Poubelle invente la poubelle

Eugène Poubelle fut nommé préfet de Charente par Adolphe Thiers, président du Conseil, avant d’être préfet de l’Isère, de la Corse, du Doubs, des Bouches-du-Rhône, et enfin de la Seine, en 1883, dont dépendait la ville de Paris.

À une époque où la fonction de maire avait été provisoirement supprimée, c’est les préfets qui administraient les communes de la France.

Face à la situation intolérable de l’assainissement de la capitale française, Eugène Poubelle décide alors d’imposer aux habitants un simple réceptacle destiné aux ordures ménagères. Son secrétaire Vauthiers propose en son nom le projet au conseil municipal de Paris. Les conseillers étaient alors mobilisés par les prochaines élections. Sans même consulter le cahier des charges, ils donnèrent leur accord à cette initiative qu’ils jugèrent ordinaire et sans conséquences, alors que cette décision allait immortaliser le nom de Poubelle.

Le préfet put donc rédiger son arrêté préfectoral relatif à l’enlèvement des ordures ménagères, pour lutter contre l’entassement des déchets dans les rues de la région parisienne. En prévision des vagues d’épidémies attendues pour l’été, il le publia le 7 mars 1884, sous la IIIe République.

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Cet arrêté oblige les propriétaires parisiens à fournir à chacun de leurs locataires un récipient destiné à leurs ordures ménagères. Il dispose en fait que : « Dorénavant, les ordures ménagères seront ramassées par l’intermédiaire d’un récipient de bois garni à l’intérieur de fer blanc. De manière à ce que rien ne puisse s’en échapper. Ces récipients pourront également contenir des cendres chaudes sans risque d’incendie ». Voici le texte en substance. « Il devient désormais interdit de jeter par les fenêtres, tant de jour que de nuit, aucune eaux, urine, matière fécale et autre ordure sous peine de trois cents livres d’amende. Le propriétaire de chaque immeuble devra mettre à la disposition de ses locataires un ou plusieurs récipients communs pour recevoir les résidus de ménage ».

Le préfet Poubelle avait non seulement établi la dimension et la contenance de ces boîtes à ordure. Il avait aussi songé à les faire distribuer par trois, dans le but d’organiser un tri sélectif. Le premier bac devait recevoir les matières putrescibles. Le second les chiffons et les papiers. Le troisième se destinait à ramasser la faïence et les verres.

Ces boîtes devaient être vidées chaque matin, dans les tombereaux prévus à cet usage, par des balayeurs municipaux qui annonceraient leur venue au son d’une corne semblable à celle qu’utilisaient les employés de chemin de fer. En publiant cet arrêté, Poubelle bannissait entre autres le métier très répandu de chiffonnier dans la capitale du pays.

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Cette loi souleva ainsi l’indignation des personnes directement concernées. Mais également des hygiénistes. Ceux-ci prétendaient en effet que cette mesure ne ferait qu’accroître la putréfaction à l’intérieur des logements. Cela pendant la nuit et dans les boîtes elles-mêmes.

Les élus qui voulaient préserver leur électorat, se sentirent profondément dupés. Dès le 16 janvier 1884, le Figaro critique la boîte Poubelle (avec une majuscule). Les Parisiens les plus mécontents reprirent ce terme. Ils donnèrent bientôt le nom de leur préfet à ces réceptacles à ordures. Très rapidement, on utilise le mot un peu partout. Dès 1890, il entre dans le supplément du Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle.

Notons finalement qu’au lendemain de l’épidémie de choléra de 1892, le préfet Poubelle se distingua par une autre mise en place à laquelle la salubrité publique lui demeurera à jamais redevable. C’est le tout-à-l’égout.

eugene poubelle
Eugène Poubelle. Photo de l’époque, image libre de droits.

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