Situation écologique de la rivière Saint-François
Le bassin de la rivière Saint-François est l’hôte de divers groupements forestiers, dont l’érablière à boueleau jaune dans le secteur ouest et au centre du territoire. Ces deux associations font place à l’érablière à bouleau jaune et à hêtre, ainsi qu’à l’érablière à bouleau jaune et à tilleul, dans les secteurs est et nord-est. La sapinière à bouleau jaune couvre les montagnes frontalières de l’extrémité sud-est des Cantons-de-l’Est.
Dans son ensemble, la région recèle plus d’une dizaine d’écosystèmes forestiers exceptionnels (EFE) couvrant plus de 300 hectares de forêts privées, dont trois forêts anciennes, comme le bois Beckett de Sherbrooke; trois forêts regufes, dont l’érablière à frêne du mont Orford; deux forêts rares, dont la pinède à pin rouge, et trois combinaisons de forêts rares et refuges. Les érables font partie de la végétation locale.
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À elle seule, la région du parc national Frontenac qui ceinture le lac Saint-François se démarque par une grande diversité de milieux naturels avantageusement pourvus en faune et en flore. Les vallons feuillus abritent le cerf de Virginie et le héron, alors que la mosaïque de lacs, d’étangs, de marais et de ruisseaux qui irrigent la forêt de conifères sert de refuge aux canards, aux loutres et aux autres animaux aquatiques.
Une tourbière d’environ 2 kilomètres carrés se déploie dans le secteur Saint-Daniel, donnant asile à plusieurs plantes carnivores et à une grande diversité d’orchidées. Une portion de la tourbière permet d’observer un phénomène de structuration rare à cette latitude : le tapis de mousse est fragmenté en longues mares séparés par de minces cordons de spaignes. Il s’agit de l’exemple le plus méridional de ce type de conformation.

La Corporation de conservation du boisé de Johnville veille jalousement sur une tourbière et des étangs ombrotrophes. Au sein des ces étangs on recensa une trentaine de mousses. De plus, y existe plus de 400 espèces de plantes vasculaires. Situé au sud-est de Sherbrooke, le site invite à la découverte de milieux rares. Ils sont des vestiges de la dernière glaciation. Disons qu’ils agissent en gardiens d’une faune et d’une flore luxuriantes.
Dans son ensemble, la vallée du Saint-François compte une multitude de milieux humides de superficie variable. Les plus modestes étant souvent l’œuvre des castors.
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Si l’on excepte ces derniers pour se concentrer sur les habitats de plus de 25 hectares, la région estrienne regroupe environ 6000 hectares de zones humides.
Bon nombre d’entre elles s’étendent à la tête marécageuse de lacs réservoirs. Comme c’est le cas pour le marais du lac Mégantic. De plus le marais de Katevale (lac Magog) et celui du lac Brompton. Ces écosystèmes à la fois fragiles et indispensables soutiennent une richesse faunique régionale. Elles font donc l’objet d’une attention particulière dans la plupart des localités. On a désigné certains sites Aire de concentration d’oiseaux. Pourtant la plupart des milieux humides inventoriés se classent Habitat du rat musqué.
Bassin de la rivière Saint-François : Une rivière qui prend du mieux…
Selon des études comparatives effectuées en 1991-1992 et vers la fin du XXe siècle, le bilan de santé de la rivière Saint-François a connu une nette amélioration, que l’on attribue aux travaux d’assainissement urbain effectués au cours des dernières décennies du XXe siècle. On y souligne l’effet positif de la mise en place de systèmes de traitement par les usines de pâtes et papiers, conformément aux règlement en vigueur à cet effet. En fait, toutes les papetières de la région se sont conformées aux normes de traitement des eaux usées.
Les résultats des analyses montrent une baisse de 50 à 99 pour cent de la concentration de certains contaminants, HAP légers et acides résiniques, de même qu’une amélioration notable de l’intégrité des communautés de mollusques, de larves d’insectes et d’autres invertébrés benthiques.
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En aval d’East Angus, ainsi qu’en aval de Sherbrooke, l’indice biologique est passé de moyen à excellent.
Par contre, l’ensablement du lit de la rivière aux environs de Windsor semble nuire aux organismes benthiques. Il a provoqué une baisse de l’indice dans ce secteur. Assez brillamment, le Saint-François s’illustre par une augmentation générale de la biodiversité des invertébrés et le retour éloquent des espèces les plus sensibles à la pollution. Une autre étude montre que la vitalité des communautés de poissons s’est accrue de 1991 à 1998.

… Mais un bassin qui demeure perturbée
Le bassin de la rivière Saint-François englobe environ 120 municipalités et compte près d’une demi-million de résidents répartis sur un territoire dominé par la forêt bien que significativement touché par l’agriculture qui occupe environ 20% du total du territoire. Environ 3 000 fermes et pas moins de 140 industries majeures se sont établies entre East Angus et Drummondville en passant par Sherbrooke et Bromptonville : des papetières, des usines de textile et des entreprises agroalimentaires, lesquelles déversent dans la rivière des matières organiques ou des polluantes.
En aval de ces effluents, la diversité des espèces aquatiques diminue donc, et l’on observe des anomalies chez certaines d’entre elles. En outre, plusieurs lacs du bassin, Magog, Memphrémagog, Lovering et Massaswippi, subissent une accélration notable de processus d’eutrophisation causé par la pression humaine envahissante.
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Une étude récente a confirmé que, dans certains plans d’eau, la chair des poissons renferme une forte teneur en BPC, en mercure, en dioxines et en furannes, constat qui accuse la persistance de certaines source polluantes. De plus, d’anciens sites miniers continuent d’affecter le milieu aquatique par l’émission de rejets acides contenant de fortes concentrations de cuivre. D’ailleurs, le lac Memphrémagog subit la pression non négligeable du tourisme.
Le Saint-François et ses rivières tributaires recèlent plusieurs espèces de poissons, dont une quinzaine intéressent la pêche sportive. L’omble de fontaine fréquente surtout les ruisseaux de la partie supérieure du bassin.
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L’esturgeon se limite au tronçon du Saint-François en aval du barrage de Windsor; le touladi est présent dans la plupart des lacs dont la profondeur moyenne dépasse 8 mètres.
Depuis l’introduction de la truite brune et de la truite arc-en-ciel, ces salmonidés sont les plus communs dans les lacs et les cours d’eau de la région. La ouananiche est exclusive aux lacs Memphrémagog et Saint-François. Le lac Aylmer se démarque par une population de corégones. C’est une espèce en fait qui colonise quelques autres lacs. Tels le Saint-François, le Massawippi, le Memphrémagog et le lac Orford.
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La perchaude jouit d’une distribution générale. On voit ausi les brochets, les achigans et le doré jaune. Pourtant moins répandus. Le grand brochet et le brochet maillé partagent assez équitablement les plans d’eau dans lesquels ils se côtoient. En bres l’achigan à petite bouche domine toujours son frère à grande bouche, en termes numériques, dans les eaux où les deux espèces rivalisent. Cantonné dans un petit nombre de plans d’eau, le doré jaune subit une pression de pêche écrasante. Quant à l’abondance de l’éperlan arc-en-ciel, elle semble variable. En fait, elle est vraisemblablement supérieure dans les lacs Massawippi et Memphrémagog.
Le territoire drainé par la rivière Saint-François possède une grande richesse aviaire comprenant plus de 250 espèces d’oiseaux. Une quinzaine d’espèces de l’Estrie figurent actuellement sur la liste de celles que l’on dit susceptibles d’être désignées menacées ou vulnérables au Québec.
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Parmi les oiseaux vedettes de la région, signalons le petit butor et le troglodyte à bec court. Ceux-ci nichent dans le marais de Katevale. Tout comme le canard branchu, l’urubu à tête rouge, l’épervier de Cooper. Ausso l’autour des palombes, la buse à épaulettes, le faucon pèlerin (nicheur à Baldwain Mills), le petite nyctale et le viréo à gorge jaune.
On y a observé tois espèces dont la nidification au Québec ne se confirme pas. y ont été observées. Il s’agit du pic à ventre roux, la mésange bicolore et la paruline à ailes bleues dont l’installation prochaine est attendue dans la région estrienne. On ne répère la perdrix grise qu’à l’occasion. Cet oiseau se restreint généralement aux basses terres du secteur nord-ouest de la région. Quant au dindon sauvage, on l’observe de plus en plus fréquemment dans le secteur de Magog. Le tétras du Canada, un autre oiseau rare, s’en tient à des habitats montagneux particuliers le long de la frontière canado-américaine.
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Le goéland à bec cerclé, dont les populations ont augmenté ces dernières années, a acquis une détestable réputation. En fait, on reproche aux colonies de cet oiseau de souiller l’eau de certaines plages publiques. Aussi de nuire aux labours des champs. En somme de réduire la capacité agricole des sols par une consommation abusive de vers de terre. Un site de nidification de goélands est présent sur une île de la rivière Saint-François, dans le secteur de Bromptonville. Les résidents d’un quartier voisin, ennuyés par les déjections d’oiseaux, ont obtenu l’autorisation de mener une campagne de stérilisation des œufs. Ils l’ont fait afin de réduire les effectifs de l’impertinent communauté.
(Rivières du Québec, Découverte d’une richesse patrimoniale et naturelle. Par Annie Mercier et Jean-François Hamel. Les éditions de l’Homme, une division du groupe Sogides).
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