La Moisie – une rivière à saumon hautement appréciée
La Moisie possède le statut fédéral de rivière à saumon et bénéficie d’une réputation avantageuse au niveau mondial. Les saumoniers y pratiquent leur sport entre mai et septembre, dans les derniers 150 kilomètres de la rivière. Chaque année, ils cumulent un effort de pêche d’environ 6500 jours. Seule la pêche à la mouche est acceptée et les permis sont vendus sur place.
Une ZEC, une propriété privée et cinq pourvoiries à droits exclusifs exploitent des territoires de pêche sur la Moisie. Les Innus de Uashat Mak Mani-Utenam pratiquent une pêche de subsistance et donnent accès à leurs territoires de chasse et de piégeage.
La pêche au saumon dans la rivière Moisie attire beaucoup d’adeptes, et la réputation du saumon de la Moisie dépasse largement ses frontières.
La montaison y est caractérisée par une forte proportion de géniteurs massifs dont le poids moyen s’établit à 7 kg. Les individus de plus de 14 kilogrammes ne sont pas rares. Ces saumons se ditinguent par l’habitude de revenir frayer dans la Moisie à plusieurs reprises, souvent après avoir passé plusierus années en mer. Cheptel unique s’il en est, il n’en accuse pas moins un déclin prononcé : les chiffres signalaient environ 20 000 saumons recensés en 1979, ils en recensent moins de 5 000 actuellement. On ne peut que remercier les pêcheurs qui ont tranquillement acquis la bonne habitude de remettre des prises à l’eau. Leurs captures annuelles de 1 000 à 1 500 saumons produisent des retombées locales de plus de 2 millions de dollars, une autre sérieuse raison de miser sur l’intégrité de la rivière Moisie et de sa faune aquatique, quand on sait que le saumon atlantique connaît des difficultés sur l’ensemble de son aire de dispersion.
La carte d’identité du saumon atlantique
Le saumon atlantique (Salmo salar) fait partie de la famille des salmonidés dont il constitue le plus roubste représentant avec ses 50 à 100 cm de longueur et un poids potentiel de 25 kg. Allongé et fusiforme, le corps de ce salmonidé arbore, en teintes et demi-teintes, le brun, le vert ou le bleu du dos; les flancs sont argentés. À l’approche du frai, la livrée vire au bronze ou au brun foncé. Les flancs des mâles se parent de points rouges, la tête s’allonge et la mâchoire inférieure prend la forme d’un crochet. Immédiatement après la reproduction, mâle et femelle muent à nouveau en tons très foncés, presque noirs.
Le saumon atlantique est présent de la baie d’Ungava jusqu’au Connecticut, dans le nord des États-Unis. Poisson anadrome type, la plupart de ses populations adultes vivent en eau salée et se reproduisent en eau douce. Certains géniteurs entreprennent leur migration vers les frayères au printemps ou au début de l’été. D’autres remontent les cours d’eau à la fin de l’été ou au début de l’automne. Au fil des étapes, les saumons adultes s’adaptent graduellement à un habitat dulcicole. Ils parcourent, parfois jusqu’à 500 kilomètres et franchissent de nombreux obstacles, dont les rapides et les chutes. La fin du frai signifie la mort pour un certain nombre d’entre eux. Épuisés, à peu près 34% des reproducteurs prendront un repos de quelques mois avant de regagner la mer. D’autres, quoique maigres et décharnés, se laissent dériver sens devant derrière hors de la frayère. Ils reviendront frayer l’année suivante ou après avoir respecté un plus long délai.
Les femelles pondent habituellement entre 2200 et 15 000 œufs sur un fond de gravier, dans le courant, à une profondeur de 0,5 à 3 mètres. Elles recouvrent les œufs de gravillon et ce cailloux après la fécondation. L’éclosion survient environ 110 jours plus tard. Les alevins restent ensevelis dans le substrat jusqu’en mai ou en juin, puisant leur énergie à même le sac vitellin. Une fois émergés, les jeunes nagent dans le courant jusqu’à ce qu’ils aient atteint 6,6 cm de longueur. Les tacons croissent lentement, de sorte qu’ils auront déjà 2 ou 3 ans avant d’être physiologiquement prêts pour le voyage vers la mer. Ils mesurent alors de 12 à 15 cm et sont appelés saumoneaux ou smolts en anglais. Au moment de revenir frayer dans la rivière d’origine, c’est-à-dire 1 ou 2 ans plus tard, on les surnommera, selon l’âge et la taille castillons, madeleineaux ou dibermarins.
Les jeunes individus, tacons et saumoneaux, se nourrissent surtout de larves, de nymphes, d’insectes aquatiques et terrestres; les adultes consomment des crustacés et des petits poissons comme le hareng, l’éperlan, le capelan et le lançon. Le saumon atlantique vit rarement plus d’une dizaine d’années. Avec l’homme, ses principaux prédateurs sont le harle, le martin-pêcheur, l’anguille, le thon, la goberge, l’espadon, le flétan et le requin.
Notons que les principales activités aquatiques, hormis la pêche au saumon, dans le bassin de la Moisie, sont la baignade, la pêche et la navigation dans le secteur en amont de la rivière; le kayak de mer, la planche à voile dans le secteur de l’embouchure.
Selon monseigneur René Bélanger, président fondateur de la Société historique de la Côte-Nord, le toponyme Moisie pourrait dériver de l’ancien français moise ou moyse, « berge humide d’une rivière » ; à son embouchure, ce cours d’eau serpente en effet à travers une étendue de sable et d’argile, plus ou moins marécageuse. Au début des années 1960, au temps de la guerre froide avec le bloc soviétique, les forces armées du Canada y avaient installé une base de radar, aujourd’hui abandonnée.
Rivière Nipissis
D’un peu plus de 65 km, la rivière Nipsissis, signalée sous ce nom en 1892 sur un document de l’arpenteur Vincent, joint la rive est de la rivière Moisie, à une trentaine de kilomètres de son embouchure. Au nord des lacs Siamois qui constituent sa source, le cours d’eau se prolonge encore sur un peu plus de 60 km par un tronçon qui porte, au moins depuis la publication du « Répertoire géographique du Québec (1969), le nom de Matinipi. Ce segment supérieur, au début du XXe siècle, n’était pas identifié. Par ailleurs, une rivière Nipisso, provenant d’un lac ainsi nommé, se déverse dans la rivière Nipissis, à une vingtaine de kilomètres au nord de la confluence de la Nipissis avec la Moisie. Sauf le père Lemoine (1906), qui donne la définition de lac couvert de nénuphars, définition reprise dans le « Dictionnaire des rivières et lacs de la province de Québec (1914 et 1925), les auteurs attribuent à ce toponyme montagnais descriptif la signification de « petite nappe d’eau, petit cours d’eau ». Suivant René Bélanger, J.-B.-L. Franquelin aurait, en 1699, identifié ce cours d’eau comme Petit Saguenay.
Rivière Pigou
D’une longueur approximative de 35 km, la rivière Pigou arrose en partie le territoire de la municipalité nord-côtière de Moisie. Elle prend sa source dans le Petit lac Travers, à 10 km au nord du canton de Rochemonteix, puis coupe ce dernier en deux du nord au sud jusqu’à son estuaire sur le Saint-Laurent, à environ 60 km à l’est de Sept-Îles. Un petit affluent du nom de Pigou Est l’alimente, à quelque 6 km environ de son embouchure. Que l’appellation Pigou provienne de l’algonquin pikiou signifiant « gomme », rivière à la gomme ou du montagnais « pikiou » qui veut dire la poix, elle désigne dans les deux cas un site où l’on trouve de la gomme résineuse et agglutinant extraite du sapin ou du pin. Des îles et un banc de pêche, situés à proximité, portent également ce nom. Une autre hypothèse suggère qu’il s’agit plutôt d’un ancien terme de marine qui identifiait un chandelier propre à tenir la chandelle. Nous retenons toutefois l’origine montagnaise.
Dès 1694, Louis Jolliet désignait l’actuelle rivière Saint-Augustin sous le nom de Pegouasiou, qu’il écrit aussi Pegouachiou et Pegouasiosipi. Formes qu’on peut certes rapprocher de Pigou. Le nom de la rivière Pigou n’est indiqué dans les documents qu’à la fin du XIXe siècle. En 1892, l’arpenteur C.C. Duberger écrit dans son rapport que “la rivière Pigou est petite et ne paraît pas être bien longue”. Dans son Journal, Placide Vigneau ne mentionne que le lieu Pigou situé à l’embouchure du cours d’eau du même nom seulement en 1903.
Bibliographie :
- Rivières du Québec, Découverte d’une richesse patrimoniale et naturelle. Par Annie Mercier et Jean-François Hamel. Les éditions de l’Homme, une division du groupe Sogides).
- Pêche au saumon.