Ville de Québec

Les dangers du cap Diamant

Les dangers du cap Diamant

Le cap Diamant s’effrite — la ville de Québec menacée

Les habitants commencent à s’alarmer – Éboulements nombreux. – Dégâts causés. – Chaque orage, chaque tempête semble être un avertissement

Les autorités sont au courant

Le cap Diamant s’effrite. Toute une partie de la population du vieux Québec est au courant. Et tous les journalistes et les observateurs qui passent sous le cap, examinant ses pierres immenses suspendues au-dessus de leur tête se disent : « C’est un endroit magnifique pour une belle catastrophe lui fera beaucoup de bruit. Beaucoup de bruit et sans tous les sens. »

Un jour, bientôt peut-être, un reporter reviendra surexcité à son journal pour rédiger une nouvelle dans ce goût-ci :

« Toute la basse ville est terrorisée. Une partie des citoyens qui habitent cette région viennent d’être écrasés, broyés à mort par un éboulement de roches pesant deux mille tonnes qui se sont détachées du bloc principal du cap Diamant. Maisons, hangars, voitures ont été détruits et réduits en poussière dans l’espace d’un instant. La terrible catastrophe s’est produite au moment où personne ne s’y attendait. Chacun se croyait en sûreté et à l’abri sous le roc solide du cap Diamant et voilà que ce roc a causé la mort d’une centaine de personnes… »

Et le rédacteur, mis en verve, continuera de déverser sur le papier des visions d’horreur. Il racontera le transport de lambeaux de chair à la morgue et la course affolée des ambulances à travers la vieille cité; fera le récit touchant de scènes déchirantes; montrera des mères cherchant leurs enfants sous les débris de pierre; des vieux recueillant pieusement ce qui reste de leurs souvenirs de famille et des tout petits égarés, perdus, ne sachant plus où retrouver leur mère et pleurant seuls dans un coin, assis sur une grosse roche.

Et la nouvelle nous parviendra sur le fil. Elle sera transmise en Europe. Elle fera le tour du monde. Chacun, le lendemain. parlera de Québec, du vieux Québec historique qui aura une curiosité de plus à montrer aux touristes: l’endroit où le cap Diamant a laissé tomber une partie de sa substance pour engloutir de braves ouvriers qui ne se doutaient pas que ce mur serait leur tombeau.

La chose est arrivée

Imaginations que tout cela direz vous! Invention pure et simple! Élucubration d’un rédacteur qui manquait de nouvelles! Et pourtant le cap Diamant a déjà commencé de à s’effriter. Depuis quelques années, des pierres pesant des tonnes se sont détachées de ce bloc immense qui fait l’admiration de tous les voyageurs et devant lequel, dit-on, Jacques Cartier resta extasié. Des maisons, des hangars et des automobiles ont été démolies.

Voitures mises en pièces

En 1934, sous le parc Montmorency, au pied de la Côte de la Montagne, toute une rangée d’auto- mobiles qui stationnaient a a été démolie. Les voitures furent réduites en miettes sous un éboulement qui jeta l’épouvante dans tout le quartier. Personne heureusement ne se trouvait dans ces voitures au moment de l’accident. Cette fois le sort a été clément. Mais le sera-t-il toujours?

Les Québécois flegmatiques

En diverses autres circonstances, il est arrivé que des hangars soient détruits sous des éboulements semblables. Mais les Québécois ne sont pas des gens nerveux. Ils construisaient au même endroit de nouvelles maisons qu’ils habitaient.

Les récents orages

Pourtant, les récents orages, ceux de la semaine dernière en particulier, ont quelque peu changé l’attitude flegmatique des citoyens de Québec qui habitent sous le cap. Des centaines de familles durent évacuer leur demeure après un orage violent qui faillit faire glisser des tonnes de roches et de grosses pierres sur la basse-ville. Tous les citadins de la rue Champlain ont subi des dégâts par la pluie qui tombait du haut du cap Diamant dans leurs maisons. On dut placer des appuis et des contreforts pour empêcher que de nouveaux éboulements ne se produisent.

Les autorités averties

Mais les autorités de la ville de Québec sont au courant de cet état de chose et prennent des dispositions pour consolider le cap du côté de la basse ville: Saint-Roch et Saint-Sauveur et même au cap Blanc vers l’Anse-au-Foulon. Avec ces précautions, l’effondrement du cap n’aura probablement lieu que dans notre imagination.

(Cet avertissement a été publié par le journal Le Petit journal, le 22 août 1937).

Éboulis sous le cap Diamant. Un mort

Deux garçonnets ont été ensevelis sous une avalanche de neige, hier après-midi, alors qu’ils glissaient le long de la falaise du cap Diamant, en bordure de la nue Champlain, à Québec L’un d’eux a été trouvé mort asphyxié tandis que son compagnon est dans un état sérieux à l’Hôtel-Dieu souffrant notamment de profondes engelures. Les deux enfants sont demeurés plusieurs heures sous la neige. La victime est le jeune Guy Morissette, 8 ans, fils de M. et Mme Marcel Morissette, du 455 de la rue Champlain. Son corps repose sur les dalles de la mor ­ gue provinciale où il fut transporté après que la mort eut été constatée à l’hôpital.

L’ami de la victime est Pierre Martin. 12 ans. fils de M. Raymond Martin, du 461 de la rue Champlain. Il s’en tirera vraisemblablement. Les médecins craignaient la nuit dernière d’être forcés de lui amputer un bras. Le drame s’est vraisemblablement déroulé vers 3h.30 de l’après-midi. Il s’est produit vis-à-vis Notre-Dame-de-la Garde, en bordure de la rue Champlain, entre un mur de béton d’une dizaine de pieds de hauteur et le cap. Les deux garçons n’ont été découverts que vers in h.30, hier soir, par une équipe de chercheurs composée de citoyens. C’est une botte, appartenant au jeune Martin, qui a permis de localiser l’endroit où les deux enfants étaient ensevelis. Pour les dégager, il a fallu utiliser les pelles. Les garçonnets reposaient sous environ six pieds de neige. Le jeune Morissette était debout, le long du mur de béton, lorsqu’il fut découvert. À l’endroit où la tragédie s’est, produite, le cap peut atteindre 200 pieds de hauteur. L’avalanche se serait produite du centre de la falaise. Guy Morissette et Pierre Martin avaient laissé le domicile de leurs parents vers 2h.30 pour aller s’amuser dans la neige. En glissant le long de la falaise, les deux compagnons furent surpris par l’éboulis et ensevelis.

La tempête faisait rage à ce moment-là. À l’heure du souper, comme les deux enfants manquaient à l’appel, les parents s’inquiétèrent du sort de leurs fils et des recherches furent entreprises avec l’aide de la police. Vers 10h.30. la découverte, dans la neige, d’une chaussure appartenant au jeune Martin devait être un indice sûr. Des recherches plus poussées permirent alors de découvrir les deux enfants, à quelques pieds l’un de l’autre, sous l’avalanche. Le jeune Martin fut trouvé le premier. Il était évanoui et souffrait d’engelures. Quelques moments plus tard, on trouvait le corps inerte du jeune Morissette, le long du mur de béton. Le garçon était debout et enseveli sous six pieds de neige. La mort avait fait son oeuvre. Le coroner – suppléant. M. Paul Magnan, a ouvert une enquête, ce matin, à la morgue de Québec en présence des parents de la victime ainsi que des enquêteurs municipaux, les détectives municipaux Jean-Marc Roy et Léon Doyon.

Voir aussi :

rue sous le cap
Rue Sous-le-Cap. Photo de GrandQuebec.com.

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