Décadence de l’art attribuable aux progrès industriels
Conférence du R. P. M. – A. Couturier au Kiwanis St-Laurent
« La décadence de l’art et surtout de l’art chrétien qui se manifeste par la camelote coûteuse et du goût le plus niais qu’on trouve dans les églises et associée aux progrès industriels et aux lois du régime économique qui veulent que tout soit fait en série et plus rien des mains de l’artiste », disait, hier midi (mercredi 16 mai 1940), devant les membre du Kiwanis-St-Laurent, le R. P. Marie-Alain Couturier, o.p., peintre français bien connu.
« Cette association vous prouve, à vous, hommes d’affaires, qui considérez l’artiste comme un être un peu inutile, a ajouté le conférencier, que la classe d’hommes que vous réprésentez a des relations assez étroites avec le monde artistique. »
Le R. P. Couturier a ajouté en ce qui concerne l’art chrétien que l’église de Berthier-en-Haut qui date du XVIIIe siècle, renfermait un exemple frappant de cette décadence de l’art. L’église elle-même est très jolie, a-t-il dit, certains vieux tableaux sont d’une réelle valeur artistique, mais ce qu’on y a ajouté depuis est d’un goût médiocre et vulgaire.
« Il me semble, a dit le R.P.Couturier, qu’avec tous les progrès et la fabrication en série, nous avons perdu ce sens naturel de la beauté qu’avaient nos ancêtres. Il est vrai que nous remarquons un réveil de ce goût artistique, mais il doit être beaucoup plus complet ».
« Après tout, continue le conférencier qu’est-ce qui compte dans une nation, qu’est-ce qui survit, si ce ne sont ses œuvres d’art, ses signes de sa haute culture. Qu’est-il resté de l’empire byzantin qui pendant onze siècles a émerveillé le monde par ses richesses, si ce n’est quelques tableaux et quelques poèmes ? Qui a fait aimer la France à l’étranger et surtout aux États-Unis, si ce ne sont ses peintres et ses écrivains ? Est-il resté quelque chose qui puisse nous rappeler la vie d’un grand négociant ou d’un marchand puissant ?
Le R.P. Couturier a terminé sa causerie en demandant d’aider les artistes. « Ils demandent peu, dit-il, ils ne demandent qu’à vivre. Si vous voulez un art religieux digne du passé de votre race, donnez à l’artiste les moyens de vivre. Les artistes sont des enfants, pensent beaucoup d’entre vous, n’oubliez pas que c’est sur les enfants que repose l’avenir d’une race. »
Monsieur Louis Wsintainer avait présenté le conférencier qui a été remercié par M. Henri LaBelle.
(Ce texte a été publié dans le quotidien Le Canada, jeudi, le 16 mai 1940).
