Première chute de Québec
Après la première tentative échouée des Britanniques de prendre Québec, Samuel de Champlain n’était guère rassuré. Qui plus est, la situation des Français empirait, Québec n’ayant reçu de France ni vivres, ni munitions depuis l’hiver 1627-1628.
Champlain rapporte que «chaque homme était réduit à sept pois par jour, avec un peu de poisson et des racines acquis des sauvages en échange de pelleteries». Dans les dépôts, il ne restait que 50 livres de poudre à canon et la petite colonie composée d’une soixantaine de personnes se trouvait dans un état voisin de la famine.
C’est à ce moment que les Français de Québec apprennent, pour comble de malheur, que des navires de guerre anglais avaient saisi quatre navires de ravitaillement envoyés par le roi au Canada sous le commandement de Claude Roquemont. Les vaisseaux capturés étaient chargés de provisions et de 400 colons recrutés par la Compagnie des Cent Associés en guise de secours, si longtemps attendus.
Aussi lorsque trois vaisseaux anglais se présentent devant Québec durant l’été 1629, Champlain se voit obligé de céder devant une nouvelle sommation des frères Kertk (ou Kirk, ou Kerk). Le drapeau anglais flotte sur le Fort Saint-Louis et le 20 juillet 1629, Champlain, la plupart de ses hommes, les Pères Récollets et les Jésuites, tout le monde embarque pour la France.
Champlain constate que l’interprète Brûlé avait trahi les colons en vendant ses services aux frères Kertk et en leur révélant la pénible situation matérielle des Français. Champlain prédit alors que Brûlé finira mal. Et en effet, quatre ans plus tard, en 1633, il est tué par les Hurons d’un coup de hache !
De 1629 à 1632, Québec est donc sous domination anglaise. Il n’y reste que 25 Français. La garnison et les familles des soldats anglais sont évaluées à environ 90 personnes.
Pendant l’occupation, les Anglais ne se donnent pas la peine d’entretenir le fort et ses dépendances. De plus, les nouveaux occupants incendient l’Abitation de Champlain. Il semblerait que les frères Kertk comprenaient parfaitement qu’ils devraient rendre le poste aux Français, parce qu’ils l’avaient pris après la fin de la guerre entre l’Angleterre et la France et la signature de l’armistice. En conséquence, toutes les possessions acquises après la fin de la guerre n’entraient pas en ligne de compte dans les pourparlers, et devaient être restituées sans discussion aux anciens occupants.
En tout cas, les frères Kertk se contentèrent de hisser l’Union Jack sur la garnison anglaise. Londres n’a jamais envoyé de secours aux frères.
Le traité de Saint-Germain-en-Laye est signé en 1632. Londres remet à la France le Canada et l’Acadie. Curieusement, Paris ne veut pas reprendre le Canada et une partie considérable des politiciens fait pression sur le roi, présentant la Nouvelle-France comme des terres inutiles. On dit même que reprendre et fortifier la ville de Québec équivaudrait à créer un motif de plus chez les Anglais pour de nouvelle attaques.
Samuel de Champlain plaide vigoureusement la cause du Canada auprès du cardinal de Richelieu et de sa Majesté le roi Louis XIII, qui finissent par lui donner raison.